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Éoliennes : Les comptes étranges d’une holding Luxembourgeoise

Le signalement que vient de faire l’association anti-corruption AC !! à l’Autorité des Marchés Financiers concerne des sociétés d’électricité éolienne dont l’administrateur est le numéro 2 d’une filiale du Crédit Mutuel.

Eoliennes (photo d’illustration) (DR/IDJ)

C’est une drôle d’embrouille que vient de débusquer le magazine Factuel Média. Dans un article intitulé « Possible conflit d’intérêts au Crédit Mutuel », le journaliste Léo Le Calvez écrit : « Le numéro 2 de la Banque Transatlantique du Luxembourg se trouve-t-il au cœur d’un conflit d’intérêts ? Fabrice Bonischo, numéro 2 de la Banque Transatlantique du Luxembourg, une filiale à 100 % du Crédit Mutuel Alliance Fédérale, est aussi l’administrateur d’une holding du nom de An Muileann. La holding est le point de transit entre de nombreuses petites sociétés de production d’électricité éolienne françaises aux comptes douteux et le Luxembourg. »

Le marché juteux de l’éolien

Selon l’Observatoire de l’éolien, la filière des énergies renouvelables a le vent en poupe depuis quelques années. On compte en 2023 quelque 900 entreprises présentes sur les différentes activités, employant au total 28.266 salariés (+ 40% depuis 2019). Il s’agit souvent de petites sociétés avec de faibles capitaux, mais aux appétits d’ogres. Le marché est porteur. D’autant que dans le cadre de la ‘’loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte’’, l’État français garantit un prix très avantageux de rachat de l’électricité d’origine éolienne pour soutenir le secteur. Il accorde aussi des aides substantielles aux entrepreneurs sous diverses formes pour encourager la production d’électricité verte.
Selon nos confrères de Factuel Média, un certain nombre de ces petites structures sont regroupées au sein de la holding luxembourgeoise An Muileann. Petite précision : l’actionnaire principal de la compagnie financière An Muileann est la société Odessa Securities SA, ayant son siège au Panama. Elle a été épinglée en son temps par les Panama Papers.
Évidemment, cela pose un problème, notamment par rapport à la souveraineté énergétique de la France.

Anomalies et curiosités de la compta

L’enquête de Factuel Média s’est intéressée à plusieurs de ces petites sociétés productrices d’énergie verte au sein de la holding An Muileann. L’une d’elles a investi 3.000 € de capital de départ. Or, c’est la banque Transatlantique du Luxembourg qui certifie le dépôt des fonds. D’où l’éventuel conflit d’intérêts puisque le N°2 de la banque est en même temps administrateur de l’actionnaire…
Autre petite anomalie : le chiffre d’affaires de certaines de ces sociétés de l’industrie du vent est en chute libre alors que le prix de vente de l’électricité est garanti par l’État. Mais surtout, si le CA baisse, le résultat net explose. Prenant l’exemple de l’une de ces structures, Factuel Média constate que le CA est de 19.300 € en 2021, mais le résultat net est de… 1,89 M€.
Comment est-ce possible ? C’est parce que les produits financiers de participation se sont élevés, pour cette société, à 1.934.000 € en 2021. Autrement dit, elle a réalisé des placements financiers qui lui ont rapporté beaucoup d’argent.
Autre curiosité, toutes ces sociétés ont un nom commençant par « Parc Éolien ». Elles n’ont aucun salarié.

Des dividendes à l’associé unique

Voilà les infos sur lesquelles s’appuie l’association anti-corruption AC !! pour faire un signalement à l’Autorité des Marchés Financiers (AMF). Son avocat Me Vincent Poudampa précise que « selon un expert qui souhaite rester anonyme, « Le résultat net [des entreprises concernées] a été remonté sous forme de dividendes à l’associé unique, auquel cas, compte tenu du secret fiscal luxembourgeois, on ne peut y avoir accès ».
Affaire à suivre…

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