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« Les damnés » condamnés

« Les films de guerre ne devraient jamais la glorifier et en faire un grand spectacle », déclarait le réalisateur Roberto Minervini au Festival de Deauville, où il a présenté son premier long-métrage de fiction.

La mise en scène radicale de ce film a été récompensée par un Prix Un Certain Regard, au Festival de Cannes.

« Les films de guerre ne devraient jamais la glorifier et en faire un grand spectacle, on ne devrait pas faire un spectacle clinquant de la souffrance, ni glorifier les valeurs de courage associées à la masculinité », disait le réalisateur Roberto Minervini, avant la projection de son film « Les damnés » (sortie le 12 février) au Festival de Deauville. « Avec 56 conflits actifs actuellement, le maximum depuis la Seconde Guerre mondiale, je crois que c’est important d’en parler », ajoutait-il.

Pour son premier film de fiction, le cinéaste jusqu’alors documentariste a reçu le Prix de la mise en scène, catégorie Un Certain Regard, au Festival de Cannes. Peu d’action, peu de dialogues, c’est une mise en scène radicale qu’a choisi Minervini, laissant la place à un grand vide dans ce qui est à peine une fiction, les comédiens étant libres d’agir, de se comporter comme ils le voulaient dans le campement où se sont posés ses « Damnés ». Une compagnie de soldats, jeunes pour la plupart, envoyée dans des territoires encore inexplorés en 1862, pendant la Guerre de Sécession.

« Une bande de types au milieu de nulle part »

Une compagnie de soldats, jeunes pour la plupart, est envoyée dans des territoires encore inexplorés en 1862, pendant la Guerre de Sécession.

La patrouille s’installe quelque part dans une zone isolée du Montana, à l’Ouest, en plein hiver. C’est une terre où il y a tout, des animaux, de l’herbe, de l’or… un bon endroit pour y fonder une famille. Mais voilà, c’est la guerre, et il faut tenir bon en attendant des renforts, qui ne viendront probablement jamais. La « bande de types au milieu de nulle part », dont un gamin de seize ans qui n’a jusqu’alors tiré que sur des lapins, s’occupe comme elle peut ; on joue aux cartes, au baseball, on s’entraîne au maniement des armes, on monte la garde, on fait des prières, et dans cet ennui, on se demande ce qu’on fait là, on s’interroge, sur la vie, le bien, le mal, l’obligation de tuer d’autres Américains… Et c’est après une longue attente que survient une attaque soudaine, surprise, menée dans une forêt enneigée par un ennemi invisible, caché, qui ne fait que passer.

« J’ai toujours eu un problème avec les films de guerre en raison des archétypes que l’on y rencontre : l’idée de la cause juste, la lutte du bien contre le mal, la vengeance, l’héroïsme », estime Roberto Minervini. Il y a ainsi quelque chose de désespérant dans le sort de ses « Damnés » forcément condamnés. Mais avec une image qui ne fait pas « cinéma », tel un reportage qui ne ferait pas « vrai », son film ressemble plus à une reconstitution historique contemporaine qu’à un film de guerre, perdant de son pouvoir de conviction pacifiste. Et l’on pense alors à bien des films effectivement spectaculaires, mais qui ne l’ont pas forcément glorifiée et ont montré combien c’était une horreur et quelle connerie la guerre.

Patrick TARDIT

« Les damnés », un film de Roberto Minervini (sortie le 12 février).

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