A sept mois de la présidentielle (23 avril, 7 mai 2017), les candidats à la course à l’Elysée ont sorti les armes lourdes. Après la trêve estivale, plus question de minauder. On s’étripe d’abord entre amis pour les primaires (20 et 27 novembre 2016 pour la droite, 22 et 29 janvier 2017 pour la gauche) avant de se déchirer entre concurrents. La guerre sera féroce. Il va y avoir des morts sur le champ de bataille politique. Revue des troupes.
Primaire à gauche : Brutus sans César
A gauche, le casting n’est pas encore tout à fait arrêté. Les candidats ont jusqu’au 15 décembre pour se déclarer sachant que les élections à la primaire sont prévues les 22 et 29 janvier 2017. Pour l’heure, sept candidats désireux de succéder à François Hollande ont annoncé leur éventuelle participation à cette compétition interne.
– Marie-Noëlle Lienemann, 65 ans, sénatrice de Paris, ancienne ministre.
–Gérard Filoche, 71 ans, membre du bureau national du parti socialiste.
–Jean-Luc Bennhamias, 62 ans, membre de l’Union des démocrates et écologistes.
–Sidi Hamada-Hamidou, Mahorais, membre du Parti radical de gauche.
–Benoît Hamon, 49 ans, député des Yvelines, ancien ministre.
–Arnaud Montebourg, 53 ans, ancien ministre.
–François de Rugy, 43 ans, député de Loire-Atlantique, membre de l’Union des démocrates et des écologistes.
Sept candidats qui ne sont d’accord sur rien. Et aucun leader susceptible de s’imposer même si, de fait, Arnaud Montebourg semble avoir la faveur des sondages.
D’autres pourraient se déclarer bientôt. On pense évidemment à François Hollande candidat à sa propre succession. Dans son discours sur sa vision de la France, jeudi 8 septembre, le président de la République a distillé quelques petites phrases qui donnent à penser qu’il se représentera. « Je ne laisserai pas l’image de la France, le rayonnement de la France, l’influence de la France s’altérer lors des prochains mois ou des prochaines années ». Un message subliminal ?
L’ennui pour lui, c’est que 88% des Français ne souhaitent pas qu’il se représente, selon un sondage Elabe pour BFM TV du 7 septembre. Son bilan catastrophique, notamment en matière économique et de création d’emplois, semble le disqualifier.
Et puis, il y a ceux qui ne le supportent plus. Les Frondeurs : Montebourg, Hamon, Lienemann et les autres détestent ce président dont le bilan leur paraît « indéfendable. » L’ancien ministre du Redressement productif commente ainsi la cote du président Hollande dans les sondages : « En fait, il s’agit d’un rejet massif de la population, de nos compatriotes qui ont mesuré l’échec…. On ne peut le faire [redresser la France] qu’avec de nouvelles pratiques, de nouveaux projets, de nouvelles idées. C’est ce que je propose aux Français. »
Le cas Macron
A l’université d’été de La Rochelle ce week-end, les Frondeurs ont appelé publiquement « à la convergence » pour éviter une sévère déroute à la présidentielle. Mais, en privé, ils n’y croient pas. Et ils continuent de s’étriller. Où est passée La Belle alliance populaire, qui devait animer ces primaires ?
François Hollande, déjà en difficulté dans les sondages, est aussi en difficulté dans son propre camp. En milieu de mandat il a perdu le soutien des écologistes avec la démission de Cécile Duflot et de Pascal Canfin, au printemps 2014. Trois mois plus tard, trois ministres de son aile gauche claquaient la porte du gouvernement Valls : Arnaud Montebourg, Benoît Hamon et Aurélie Filippetti.
Plus récemment, le chef de l’Etat il a perdu le soutien de son aile droite avec le départ d’Emmanuel Macron du gouvernement, le 30 août 2016.
« Une trahison », « Un coup de poignard dans le dos » pour de nombreux socialistes. « Comme Brutus a poignardé César » rappelle le patron des socialistes Jean-Christophe Cambadélis. Sauf que « Hollande n’est pas César » persiffle Jean-Luc Mélenchon.
Emmanuel Macron n’a pas officiellement annoncé sa candidature à la présidentielle et encore moins son éventuelle participation à la primaire socialiste. Pourtant, son départ précipité du gouvernement et les déclarations qui ont suivi ne laissent que peu de doute sur ses intentions.
Comme nous l’écrivions le 30 août, Macron est « En Marche vers l’Elysée ». Il a démissionné de son poste de ministre de l’Economie pour « être libre et responsable ». Car il « souhaite entamer une nouvelle étape de [son] combat politique ». Or, dit-il, « le seul moment où les débats nécessaires pour décider ces transformations peuvent utilement avoir lieu sont les campagnes présidentielles ».
Comment douter ? Dès ce mois-ci Emmanuel Macron fera « un diagnostic » pour la France. Puis, il proposera « des actions en profondeur. » Autrement dit, un programme susceptible de rallier électeurs de gauche et de droite. Il pourrait bouleverser le jeu politique dans les deux camps.
Mélenchon, l’insoumis
Dans ces conditions, François Hollande a-t-il une chance de remporter la primaire si toutefois il se présente ? Certes, il a envie d’y aller. Envie de rejouer le match de 2012. Contre le même adversaire dont il connaît désormais les faiblesses, notamment judiciaires. Mais le baromètre de sa cote d’amour auprès des Français reste au plus bas. Difficile de gagner une élection dans ces conditions.
Pour l’instant, les personnalités de gauche qui auraient la faveur des Français ne semblent pas disposées à se présenter face à Hollande : Manuel Valls, Christiane Taubira ou Martine Aubry. Mais ils peuvent changer d’avis.
Plus à gauche, Jean-Luc Mélenchon a annoncé sa candidature à la présidentielle « pour une France insoumise et fière de l’être ». Avec quels soutiens électoraux ? Le Front de gauche n’existe plus. Et le Parti communiste entretient des relations assez fraîches avec Mélenchon depuis que ce dernier a décidé de faire cavalier seul pour les présidentielles. En 2012, le chef de file du Front de gauche était arrivé en quatrième position avec un total de 11,13% des suffrages.
Depuis, bien des choses ont changé. Et le conflit social autour de la loi El Khomri semble avoir déclenché une dynamique plutôt favorable à la gauche de la gauche.
Ce que confirment plusieurs sondages. En juin 2016, un sondage BVA/Salesforce, en partenariat avec Orange et la presse régionale plaçait déjà Mélenchon devant François Hollande au premier tour de la présidentielle. Un nouveau sondage du 7 septembre 2016 réalisé par TNS Sofres-OnePoint pour le Figaro et LCI nous apprend que « Mélenchon est le meilleur candidat de la gauche » avec 23% des intentions de vote devant Hollande (20%), Macron (18%) et Valls (9%). Un autre sondage IFOP pour le Journal du Dimanche du 4 septembre, indique que 41% des électeurs de gauche seraient prêts à voter Mélenchon.
Mais il ne s’agit que de sondages. Et il reste encore sept mois avant les élections présidentielles. D’ici-là, on va continuer à s’étriper à coup de phrases assassines. Une vraie foire d’empoigne sous le regard goguenard du Front National qui compte les points, en attendant son heure.
Marcel GAY
Primaires de la gauche : ce que l’on sait
Peuvent donc y participer outre les membres du PS, les radicaux de gauche, l’Union des démocrates écologistes (UDE) qui rassemble les écologistes qui soutiennent l’exécutif et Génération écologie mais aussi tous ceux qui se retrouvent dans la politique menée actuellement.
Si les autres partis de gauche n’y participent pas, elles auront lieu les 22 et 29 janvier. Le dépôt des candidatures se fera entre le 1er et le 15 décembre. Ses modalités exactes seront arrêtées par le PS lors d’un conseil national le 2 octobre après consultation des partenaires qui décideraient d’y participer.
Elles devraient reprendre les grands principes des primaires citoyennes de 2011 même si Jean-Christophe Cambadélis prévoit déjà qu’il y aura « moins de votants » cette fois en raison de « l’urgence » dans laquelle ces primaires sont décidées. En 2011, la primaire PS, avec six candidats avait attiré près de 2,7 millions de participants au premier tour et près de 2,9 millions au second. François Hollande avait été désigné pour porter les couleurs du parti, battant au second tour du scrutin Martine Aubry avec près de 57 % des voix.