L’élection présidentielle américaine révèle la vraie nature de la première puissance mondiale : son peuple armé, violent, divisé, sa démocratie fragile, ses institutions archaïques. Le rêve américain tourne au cauchemar.
Ces élections américaines nous ramènent aux 18ème et 19ème siècles chez les chasseurs de prime et les vachers sans foi ni loi pendant la conquête de l’Ouest. Quelques semaines avant le scrutin destiné à élire le 46ème président des Etats-Unis, dans un contexte particulièrement anxiogène attisé par le sinistre président Donald Trump, les Américains ont acheté des armes à feu. Plus de 16 millions de flingues achetés entre mars et septembre 2020 selon France Info. Soit 91% de plus que l’année précédente. Ce qui porte à 400 millions le nombre d’armes en circulation dans ce pays de 328 millions d’habitants. Pas étonnant que, de temps à autre, un excité tire dans le tas.
Les Etats Désunis
Quel intérêt d’acheter une arme pour aller voter ? Parce que les Américains nantis redoutent des débordements post-électoraux. Parce qu’on est en Amérique, au pays des cowboys, où celui qui tire le plus vite a souvent raison. Parce que la violence est consubstantielle à la démocratie, dans ce pays où quatre présidents ont été assassinés : Abraham Lincoln (1809-1865) tué par un sympathisant sudiste. James Garfield (1831-1881), assassiné par un fou furieux. William McKinley (1843 -1901) touché de deux balles tirées par un anarchiste, John Kennedy (1917-1963), tué par à Dallas dans sa voiture présidentielle. Ça fait beaucoup.
Parce que dans cette Amérique du 21ème siècle, le fossé ne cesse de se creuser entre les conservateurs du centre et du sud et les progressistes des grandes métropoles, entre les riches et même très riches et les pauvres, toujours plus nombreux. Parce que la société américaine est gangrénée par le racisme. Parce qu’elle est profondément divisée entre des intellos des grandes villes ou les technos de la Silicon Valley et les ignorants stupides et hargneux des grandes plaines de l’ouest et du Middle West. Parce que la fracture est telle, désormais, que le chaos menace. Et fait peur.
Attaque de diligence
C’est dans ce contexte très particulier que s’est déroulé l’élection présidentielle. Le président sortant Donald Trump et son challenger, Joe Biden, se sont affrontés dans une ambiance délétère, faite de crainte et même de haine sur fond de crise sanitaire du Covid. Une campagne où pro et anti se provoquent comme l’auraient fait, jadis, leurs aïeux. En témoignent, les images surréalistes de la télévision, le 30 octobre 2020, où l’on voit les partisans de Trump, drapeaux et bannières déployées sur les voitures, encercler le bus de campagne de Joe Biden sur une autoroute. Comme au bon vieux temps des diligences. Heureusement, personne n’a sorti son colt.
Depuis le 3 novembre, jour de l’élection, on compte et on recompte les voix. Très rapidement, sentant que la victoire lui échappait, Donald Trump s’est déclaré vainqueur en criant, sans preuve, à la fraude électorale massive. Ses supporters l’ont suivi dans ce délire anti-démocratique.
Le risque d’une explosion de violence est tel que, un peu partout de New York, à Philadelphie en passant par Washington, les commerces et les établissements publics se barricadent. Comme si un ouragan allait frapper. Comme si des hordes sauvages allaient tout piller. Tout le monde sait que Donald Trump a demandé aux « Proud Boys », ces unités paramilitaires qui prétendent « défendre les valeurs (!) de l’Occident » les armes à la main, de se tenir prêts. A quoi ? A se battre. Ces milices des suprématistes blancs sont donc prêtes et l’ont fait savoir.
Le temps des cowboys est revenu.