Deux mois et demi après le premier tour et une crise sanitaire qui a brouillé les cartes, les électeurs vont retourner aux urnes le 28 juin dans plus de 4.800 communes de France. Mais la donne a changé.
Les candidats éligibles au second tour des municipales devaient déposer leurs listes avant mardi 2 juin à 18 heures. On connaît donc désormais les jeux d’alliance et les fusions opérées pour une nouvelle offre politique dans les communes.
On votera donc le 28 juin 2020, sous réserve de l’accord d’un comité Théodule. On votera masqué et on est prié d’appliquer les gestes barrière (au coronavirus). Quant à la campagne électorale, elle sera réduite à sa plus simple expression et se fera essentiellement via internet et les réseaux sociaux. Voilà pour l’ambiance.
LREM disqualifiée
La crise sanitaire qui nous sépare du premier tour, le 15 mars 2020, nous a révélé l’inconséquence voire l’incompétence de la classe dirigeante : un exécutif aux abois dans la gestion des masques, des médecins aux avis contradictoires sur le traitement contre le coronavirus, des experts corrompus par les laboratoires pharmaceutiques… Bref, une véritable confusion à la française qui disqualifie l’establishment et donc tous ceux qui se réclament du parti présidentiel. Voilà pourquoi il sera difficile d’aller chercher des voix lorsque l’on se présente sous les couleurs LREM. D’autant que cette drôle de campagne s’annonce particulièrement joyeuse et divertissant avec son lot de trahisons, d’hypocrisie et de boules puantes. Petit tour d’horizon.
Droite-gauche
A Paris, trois femmes ont fait la course en tête au premier tour. Agnès Buzyn, ex-ministre de la Santé a plafonné à 17% des suffrages derrière la maire sortant (gauche) Anne Hidalgo totalisant 30% des suffrages et Rachida Dati (droite) avec 22%. Les Verts se sont hissés au 4ème rang avec 11,5% des voix devant Cédric Villani, le mathématicien ancien ministre LREM avec 7,8%.
Au second tour, on voit mal la représentante du parti présidentiel faire un meilleur score sachant qu’elle n’a réussi à nouer aucune alliance, ni avec la droite ni avec la gauche, ni même avec ses anciens amis Marcheurs. Et qu’elle repart avec un lourd handicap lié à l’abandon de son poste de ministre de la Santé au début de la crise sanitaire. La partie se jouera donc entre la droite (Dati) et la gauche (Hidalgo).
Terra incognita
A Lyon, où les Verts sont arrivés en tête du premier tour avec Grégory Doucet (29%) suivis des Républicains avec Etienne Blanc (16,5%) et de l’Union du centre avec Yann Cucherat (14,9%), la donne a changé.
Pour le second tour, les écolos se sont rapprochés des forces de gauche. Mais la surprise est venue de Gérard Collomb, l’ancien ministre de l’Intérieur, qui s’est retiré de la course à la Métropole après avoir scellé un pacte avec… les Républicains ! Une incroyable trahison. Par voie de conséquence, le parti macroniste lui a aussitôt retiré l’investiture. Il n’y aura donc pas de liste LREM à Lyon. Et l’avenir de Collomb reste inconnu. A moins que son avenir ne soit déjà derrière lui.
L’après Gaudin
A Marseille, le parti présidentiel est en mauvaise posture. Comme à Paris, comme à Lyon et comme dans de nombreuses grandes villes.
La cité phocéenne prépare l’après Gaudin dans la plus grande confusion.
Après de longues et difficiles tractations, les Ecologistes d’EELV ont finalement rejoint la coalition de gauche, le Printemps Marseillais, arrivée en tête au premier tour dans six des huit secteurs de la ville. Elle est conduite par le communiste Jean-Marc Coppola. Mais aucun accord n’a été conclu avec la sénatrice Samia Ghali (DVG) qui avait obtenu le soutien d’EELV au premier tour. Précisions que deux listes de gauche se sont retirées pour faire barrage au Rassemblement national du sénateur Stéphane Ravier.
Compte tenu des dissensions entre les candidats de droite, on s’oriente vers des triangulaires voire des quadrangulaires dans plusieurs secteurs. Avec, en embuscade, le Rassemblement national.
Rien n’est joué mais la campagne sera chaude.
Pas d’union Vert-Rose
A Strasbourg, les Verts sont arrivés en tête du premier tour avec Jeanne Barseghian (EELV) qui totalisait 26,7% des suffrages suivis par le candidat du parti présidentiel, Alain Fontanel (20,6%), puis Catherine Trautmann représentant le parti socialiste (19,4%), puis Jean-Philippe Vetter (Union de la droite) avec 18,2%.
Le second tour révèle une grande surprise. Jeanne Barseghian et Catherine Trautmann n’ont pas trouvé de terrain d’entente. Elles partent séparément devant les électeurs strasbourgeois. En revanche, contre toute attente la liste LREM et LR ont fusionné. Alain Fontanel (Marcheur) tirera la liste d’union sur laquelle Jean-Philippe Vetter sera en troisième place.
Sous le signe de l’écologie
A Nancy, le duel entre le maire sortant, Laurent Hénart (Divers centre) et le président du Conseil départemental Mathieu Klein (Divers gauche) a tourné à l’avantage du second. Klein a collecté 38% des suffrages le 15 mars contre 35% à Hénart soutenu par LREM. Les Verts (Ecologie citoyenne) emmenés par de Laurent Watrin sont arrivés en troisième position avec environ 11% des suffrages.
Le second tour se jouera donc entre la liste inchangée de Laurent Hénart et celle recomposée de Mathieu Klein qui fusionne avec la liste de Laurent Watrin, placé en troisième position. Le calcul des chiffres donne donc un avantage à Mathieu Klein. Mais avec un taux d’abstention proche de 63% à Nancy, les simples règles de l’arithmétique sont-elles encore pertinentes ?
Le mariage de la carpe et du lapin
La peur du coronavirus est la cause d’un taux d’abstention historique dans la bonne ville de Metz : 66,57% ! Ce qui pose, déjà, un problème de légitimité pour tous les candidats autorisés à concourir pour le second tour.
Reste que la liste de droite emmenée par le sénateur François Grosdidier (LR) est arrivée en tête de la consultation avec 29,76% des suffrages suivie par la liste de Xavier Bouvet, Unis-pour-Metz (24,97%) soutenue par le maire sortant Dominique Gros (PS) qui ne se représente pas, et de la liste de Françoise Grolet (RN) avec 11, 79% des voix.
Quant à Gérard Lioger, député LREM, il atteint péniblement les 7% des suffrages et doit donc se retirer de la compétition.
Le second tour ? Très ouvert en raison du fort taux d’abstention du 15 mars. Pourtant, Xavier Bouvet a sans doute fait une erreur de jeunesse en refusant toute alliance entre les deux tours. Et notamment celle avec Béatrice Agamennone (6,19% des suffrages) adjointe au maire de Metz et référente LREM. Elle en a profité pour rejoindre François Grosdidier. Le mariage de la carpe et du lapin ? Ca y ressemble.
Qui succèdera à Dominique Gros, le 28 juin? Nous l’avons dit à plusieurs reprises : en dépit des apparences de pure arithmétique, le jeu reste ouvert.