A quelques jours de grandes manifestations contre la hausse du prix des carburants, celui qui signe Catroy (oui, c’est un pseudo) conseille à Emmanuel Macron de taxer un peu tout pour remplir les caisses de l’Etat. « Même la pauvreté et la connerie » dit-il dans sa missive poilante.
Monsieur le Président,
Je suis un récent retraité qui tient absolument à vous faire savoir son ravissement de participer financièrement à l’édification de votre piscine de Fort Brégançon, dont l’utilité et l’urgence devraient sauter aux yeux de tous nos concitoyens.
Grâce à l’augmentation du prélèvement CSG sur leurs maigres pensions, tous les retraités de France auront l’illusion de posséder une piscine en temps partagé, et d’en être les utilisateurs par procuration.
Il faut que justice vous soit rendue : vous n’êtes pas seulement le Président des riches, mais aussi le Président de l’ascenseur social, puisque vous permettez à tout un chacun, y compris les « sans dents » d’accéder à ce symbole suprême du luxe.
La théorie du ruissellement
Mais pourquoi s’arrêter en si bon chemin dans l’application de votre fumeuse théorie du « ruissellement », fantasme d’ado utopiste et boutonneux ?
Il reste encore tant de choses à imposer, dans le seul but d’améliorer la condition des Français, quand les nantis auront décidé de cesser de thésauriser. J’avoue être un peu déçu par cette République qui se prétend « En Marche » mais semble à court d’idées et qui piétine après seulement un an et demi d’exercice du pouvoir.
Soyez novateur, que diable, et jetez aux orties les finasseries de l’ancien monde ! Osez sans complexes !
Je suis certain que l’esprit fécond des énarques de tous poils fourmille d’excellentes idées qui ne demandent qu’à s’exprimer, pour peu qu’on les y encourage.
Et puisque vous me le demandez si gentiment et avec l’empathie qui vous caractérise si bien, permettez moi de vous livrer tout à trac mes premières réflexions, ancien petit pousse gomme sorti de la communale.
Le sucré, le salé…
Sous l’excellent prétexte de santé, un gouvernement précédent a taxé les boissons sucrées. Le peuple tout entier n’a pu qu’applaudir et se réjouir de cette heureuse initiative, frappée au coin du bon sens, qui n’est toutefois pas le sens commun.
Mais pourquoi diable ignorez vous le sel, généreusement distillé dans notre alimentation, et tout aussi nuisible que le sucre, ce qui est scientifiquement démontré ?
Imposez donc ce sel, en excès dans les chips, les cacahuètes, les charcuteries et autres fromages.
La santé des Français ne pourrait que s’améliorer, en même temps que se renfloueraient les comptes de la sécurité sociale… De quoi faire rosir de plaisir la si délicieuse Agnès Buzin…
Certes, vous rétabliriez ainsi la gabelle, ce qui fait un peu désordre pour un qui se veut l’incarnation même de la modernité, mais un moment de honte est vite passé au regard de votre conception si aigüe de l’intérêt général. Et puis, comptez sur l’ignorance des Français pour ne pas s’en rendre compte.
Les produits toxiques
Dans le même ordre d’idées, pourquoi ne pas taxer punitivement les produits non bio, puisque toxiques pour la santé aussi bien que pour l’environnement, tous deux si chers à vos yeux ?
Faire payer ceux qui s’empoisonnent volontairement me semblerait une politique contre laquelle nul ne trouverait à redire et qui justifierait au moins un prix Nobel. Cela conduirait à augmenter mécaniquement la part du bio dans notre alimentation, tout en remplissant les caisses de l’État grâce à des recettes supplémentaires de TVA, les produits bio étant plus chers que les produits traditionnels.
Des idées aussi formidables, j’en ai encore plein ma hotte, et je ne suis certainement pas aussi inventif que vos têtes d’œuf de Bercy.
Par exemple, pouvez vous me dire pourquoi les piétons (et les cyclistes) ne paient aucun droit d’utilisation des rues et des trottoirs ? Il convient de rétablir cette injustice en installant des barrières de péage à chaque carrefour, activables avec le smartphone que ces privilégiés ne quittent généralement pas des yeux.
Et les trottoirs !
Et à propos de trottoirs, pourquoi ne pas louer ces merveilleux et immenses espaces à des publicitaires forcément géniaux qui sauront les mettre dignement et économiquement en valeur ?
Tant qu’on y est, trouvez vous normal qu’on ne paie pas l’air que nous respirons ? Quel formidable gaspillage fiscal, surtout qu’il ne faudrait pas oublier de surtaxer l’air pur de nos montagnes et de nos bords de mer. Aucune raison de laisser des privilégiés échapper à l’impôt, même à Chamonix, Megève ou St-Tropez. De quoi vous débarrasser définitivement de cette étiquette de Président des beaux quartiers qui semble vous avoir été tatouée par les jaloux de l’ISF. Plus égalitaire que le Macron, tu meurs…
Le terrorisme mobilise trop de forces de la Nation ? Taxez les barbus et les foulards. Succès garanti tant auprès des 6 millions de musulmans français que des aficionados de Mme Le Pen.
Taxez les parents
L’échec scolaire est une plaie de la nation ? Plutôt que d’augmenter chaque année aussi bien les budgets que le personnel enseignant, pour des résultats toujours en baisse, taxez les parents dont les enfants sont à la ramasse.
Si certains Français s’obstinent à être des cumulards, « sans dents », illettrés, fumant des clopes et roulant au diesel tout en refusant de traverser la rue pour trouver du boulot, au lieu que de tenter de les élever et que cela « coûte un pognon dingue », taxez la pauvreté et la connerie, vous devrez sans doute embaucher des agents de recouvrement.
J’ai entendu dire que les revenus de la prostitution étaient à présent intégrés dans le calcul du PIB. Pourquoi vous arrêter en si bon chemin ? Encouragez et taxez les coïts, au forfait ou au réel, ce qui vous fera de plus une double recette en cas de couples illégitimes, GLBT et pédophiles. Je ne doute pas que vos services sauront mettre en place les compteurs qui vont bien.
Les sujets qui fâchent
J’entends déjà les débats acharnés sur l’opportunité d’imposer également la masturbation (physique, pas intellectuelle, vous en seriez une des premières victimes). Enfin un sujet bien clivant permettant d’escamoter pour un temps les vrais sujets qui fâchent. Ne me dites surtout pas que je vais trop loin, vos petits génies à calculette n’ont-ils pas émis l’idée de taxer les résidences enfin payées, au bout d’une longue vingtaine d’années de rançonnage bancaire ?
Voilà quelques petites idées simples que je soumets modestement à votre très haute estimation. Je ne doute pas qu’avec les rentrées fiscales que leur mise en œuvre rapportera, vous pourrez enfin disposer du bassin olympique (avec plongeoir, pataugeoire et jacuzzi) que vous méritez et qui sera la fierté de mes vieux jours, es qualité de co-financeur.
Dans l’attente de votre réponse, je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de la considération à laquelle vous estimez avoir droit, en espérant que j’en aie encore les moyens.
Catroy