L’ancien secrétaire d’Etat au Budget interpelle ainsi Emmanuel Macron sur son blog : « Le maître mot de notre Président de la République, c’est : j’assume ! En la matière, ces propos relèvent de l’escroquerie intellectuelle. Voyons ici plusieurs exemples. »
1 La SNCF : Transformer un établissement public industriel et commercial (EPIC) en Société anonyme ne fait pas arriver les trains à l’heure et ne change pas la profitabilité de la structure. Mais la grande (et la principale) différence, c’est qu’un EPIC n’est pas cessible alors qu’une société anonyme peut céder tout ou partie de ses actions. Ceci dit, une société très endettée est invendable, c’est pourquoi je pense que la reprise de la dette de la SNCF par l’Etat n’est pas une priorité. C’est l’ouverture à la privatisation. L’Etat pourrait plutôt sans reprendre la dette, aider l’entreprise à la rembourser… Mais que ce soit une aide au remboursement ou une reprise de la dette, il n’est pas sûr que la commission autorise ce type d’opération, qualifiable d’aide excessive de l’Etat à une entreprise concurrentielle…. Ne pas évoquer ces questions et s’en tenir à abroger le statut des cheminots est une façon d’éviter les vrais débats et de ne pas assumer.
2 Les universités : Le nombre d’étudiants augmente et les capacités d’accueil (taille des locaux, nombre de professeurs…) des universités stagnent. Ceci est un fait incontestable. Le dilemme est donc simple : accueillir tout le monde ou bien trier les demandes. Accueillir tout le monde demande d’augmenter les capacités d’accueil et de mobiliser des crédits. Le Gouvernement a clairement choisi la seconde options. Mais il ne l’a pas dit ! Il évoque un examen des motivations des étudiants et la possibilité d’exiger d’eux une remise à niveau, mais se défend de pratiquer la sélection. Les étudiants et les français ne sont pas des imbéciles et comprennent que le Gouvernement met clairement en œuvre une sélection à l’entrée des universités, tout en disant qu’il ne le fait pas. Assumer, ce n’est sûrement pas ça !
3 La sécurité sociale : Cette frénésie à supprimer les cotisations sociales, celles des employeurs (comme d’habitude), mais aussi celles des salariés (c’est une nouveauté) est dangereuse sans réflexion préalable. Le financement de la protection sociale (maladie, retraite…) assis sur la cotisation est abandonné. Pourquoi pas… Mais avec quelle alternative ? Après quel débat ? C’est tout l’avenir d’une originalité française qui est en jeu. On peut choisir de financer par de la TVA ou par de l’impôt (de la CSG par exemple). On peut aussi choisir de ne rien financer, et de laisser chacun se tourner vers des assurances privées. Ce Gouvernement ne dit pas vers quoi il veut aller, mais le recours au privé semble être cher au cœur du Président Macron, comme il l’était pour le candidat Fillon. Dans ce domaine, le Gouvernement met en œuvre des choix sans les assumer au grand jour.
4 Le rôle et la place de l’Etat : Renoncer à des missions, privatiser des pans entiers de l’économie, supprimer 120 000 fonctionnaires…. La place de l’Etat, réaffirmée dans les discours, ne cesse de se réduire surtout en milieu rural. Fin des hôpitaux de proximité, fermetures de petites écoles, de guichets de gendarmerie, de trésorerie, de La Poste… L’aménagement du territoire et le financement des collectivités territoriales font la part belle aux métropoles ! Ce débat sur les déséquilibres villes campagnes n’est pas tenu. Quelques mises en scènes télévisées veulent donner le change. Mais n’est-ce pas le moment de pratiquer plus de péréquation pour que les inégalités territoriales soient corrigées par la volonté politique. Assumer, ce serait dire pourquoi on refuse de partager les richesses.
Le Président actuel a été élu par un concours de circonstances largement commenté. Ce qui est dommage – et pour une fois Emmanuel Macron n’y est pour pas grand-chose – c’est que la campagne électorale n’ait pas évoqué les sujets sur lesquels aujourd’hui le Président prétend assumer des positions prises sans réel mandat de celles et ceux qui l’ont élu.
Le seul argument consiste à dire lorsqu’un domaine dysfonctionne, qu’il est nécessaire de le réformer…. Jusque là tout va bien… Sauf que le contenu de la réforme proposée est plus important que l’existence même de la réforme ! Face à un malade, chacun conviendra qu’il faille une ordonnance pour le soigner. Mais on peut aussi se dire tranquillement que l’efficacité des soins sera fonction de ce que l’on écrit sur l’ordonnance. Ce Président se vante de la vitesse et du nombre des réformes… Pour mieux nous en faire oublier le contenu !