Le coup de gueule des représentants des HLM d’Alsace et de leurs partenaires.
Ce samedi matin à Strasbourg, l’Areal, représentant les organismes HLM d’Alsace et leurs partenaires : élus locaux, associations de locataires, fédérations et associations de lutte contre le mal-logement, syndicats, entrepreneurs et promoteurs immobiliers, * ont fait front commun, de façon très inédite, à la fois trans-partisane et interprofessionnelle, pour expliquer et détailler les raisons pour lesquelles ils s’opposent résolument aux mesures logement du projet de loi de finances 2018 qui conduisent à la destruction du modèle économique solidaire du logement social français.
Attaques contre le logement social
Explications. Les dispositions relatives au logement prévues dans le projet de loi de finances présenté mercredi 27 septembre 2017 en Conseil des ministres confirment et amplifient les attaques de l’exécutif contre le logement social, et au-delà, sur les principes mêmes de la République : l’égalité, la solidarité, et la justice. Dans le PLF 2018, le gouvernement met en péril, avec le logement social, un pilier fondamental du pacte républicain, dont le Président de la République a la garde.
Sous couvert de lutte contre les déficits publics, en inscrivant dans le PLF 2018 une baisse de 1,7 milliard d’euros (3,3 milliards d’euros en année pleine) des APL des locataires du parc social, l’exécutif fragilise considérablement le modèle du logement social, et ses 11 millions de locataires, celles et ceux qui ont ou auront besoin d’un logement social, d’un logement à un prix inférieur à celui du marché.
Baisse de 80%
A contrario, le parc privé n’est quasiment pas concerné par ces mesures alors que c’est précisément à ce niveau que les loyers peuvent être abusifs. Pour autant, le gouvernement ne se saisit pas des dispositions d’encadrement des loyers prévues par la loi ALUR. Par ailleurs, le PLF 2018 prévoit de réformer drastiquement l’ISF avec comme conséquence une perte affichée de 3,3 milliards d’euros de recettes fiscales pour le budget national (soit une baisse de 80 % de cet impôt).
Le gouvernement entend obliger les bailleurs sociaux à opérer des baisses de loyers encore supérieures à la baisse des APL, et ce en dépit des conséquences que cela engendrerait :
- En affaiblissant encore un peu plus les moyens des organismes, le gouvernement pénalisera davantage les locataires du parc Hlm qui verront leur cadre de vie se dégrader par une baisse de l’entretien du patrimoine et leur pouvoir d’achat s’effriter par la réduction du nombre de réhabilitations thermiques.
- Les personnes en attente d’un logement social devront patienter davantage avant de se voir proposer un logement, la production neuve se réduisant considérablement dès 2018.
- Les entreprises du bâtiment verront également leur activité directement impactée par une nette baisse des mises en chantier.
- Enfin, les collectivités locales qui garantissent la dette des organismes Hlm, sur des niveaux significatifs d’encours, se verront supporter un risque systémique majeur et voir ainsi leur notation largement impactée. Ceci aura, à terme, une incidence sur les capacités, les conditions et modalités de financement de leurs propres investissements.
En outre, la suppression de l’APL « accession » pour les nouveaux accédants et celle du prêt à taux zéro pour la construction dans 93% des communes (zones B2 et C) sont un coup sans précédent porté à l’accession sociale à la propriété et à l’animation des territoires ruraux.
Ces mesures sont inefficaces économiquement puisqu’elles auront pour effet la très forte réduction de la construction de logements sociaux, résultat inverse à celui du « choc d’offre » proclamé par l’exécutif et permettant de répondre au déficit structurel dont souffre notre pays, largement à l’origine de la cherté des loyers, notamment en zone tendue.
Les conséquences en Alsace
Le parc HLM alsacien compte actuellement 113.500 logements sociaux, et 52 % des ménages qui y habitent touchent les APL. Rappelons qu’en 2016, les bailleurs sociaux alsaciens ont engagé la production de 2.534 logements (soit 26 % de la production immobilière résidentielle alsacienne), et en ont rénové 2069.
La baisse des APL avec l’obligation de compensation par une remise de loyer de 63 euros en moyenne, aura des effets catastrophiques pour les bailleurs sociaux.
La perte de recette est estimée à un peu plus de 43 millions d’euros pour les organismes HLM.
Au regard des fonds propres que les bailleurs doivent nécessairement injecter dans le financement d’un logement social, 43 millions d’euros de fonds propres qui ne pourront plus être mobilisés par les bailleurs sociaux, c’est l’équivalent de :
– 1.870 logements sociaux qui ne seront plus produits.
– 10.000 logements qui ne seront pas rénovés.
C’est également une perte de recette fiscale pour l’Etat (via la TVA) de 12 M€ au minimum. Le ratio en termes d’emploi est édifiant lorsque l’on sait que la construction d’un logement équivaut à la création de 1,5 à 2 emplois et 0,4 dans la rénovation. Ainsi 2.500 emplois seraient menacés.
Les entreprises impactées
La perte du chiffre d’affaires des entreprises du bâtiment de l’année 2018 totaliserait pour l’Alsace seule un minimum de 150 millions d’euros HT.
Cette estimation n’intègre pas les impacts sur la promotion immobilière privée. En effet, près de 40 % de la production des logements sociaux se fait par le biais de rachat de logements par les organismes HLM aux promoteurs privés, qui sont très souvent tenus par les documents d’urbanisme de produire une part de logements sociaux dans leurs programmes. Ces mesures entraineraient le blocage de nombreuses opérations de promotion immobilière privée.
De plus, la mise en œuvre des mesures du Projet de loi de finances 2018 aurait pour conséquence :
- D’apporter une fin de non-recevoir aux 38.000 demandeurs de logement social alsaciens qui attendent impatiemment une solution. C’est une politique qui tourne le dos au problème de mal-logement qui mine 4,5 millions de Français, selon la Fondation Abbé Pierre.
- De remettre en cause la mise en œuvre des programmes de rénovation urbaine
- De remettre en cause la qualité de services apportée aux locataires en place et des capacités d’entretien courant de notre patrimoine.
- D’arrêter brutalement la démarche de réhabilitation thermique du parc le plus énergivore, qui a pour but de préserver nos locataires de l’augmentation inéluctable des prix de l’énergie (et qui représente une réelle économie).
- De bloquer les mécanismes d’aide à l’accession à la propriété (APL accession et PTZ) dans les secteurs ruraux : c’est le parcours résidentiel d’un grand nombre de nos concitoyens qui est remis en cause, notamment pour les jeunes ménages.
- C’est une mesure injuste socialement puisqu’elle concentre les efforts à produire sur le parc HLM, (dont les loyers et leurs augmentations sont strictement encadrées), ses organismes et ses habitants, qui – en Alsace – vivent majoritairement sous le seuil de pauvreté (61 % des ménages logés dans le parc HLM alsacien).
Les intervenants à la rencontre de ce samedi 14 octobre 2017 à Strasbourg précisent : « Nous comprenons les enjeux de réduction des déficits publics de l’Etat. Nous comprenons la nécessité pour chacun des acteurs de faire des efforts pour y contribuer, et le mouvement HLM sera prêt à faire des propositions en ce sens.
Mais il faut prendre la mesure des impacts de ce projet de loi de finances, de son iniquité et de ses conséquences graves, notamment en termes d’emploi et d’activité économique.
Le Mouvement Hlm alsacien et ses partenaires appellent :
- Au retrait immédiat de ces dispositions et décident d’alerter les élus locaux, les parlementaires et l’ensemble des locataires, sur les dispositions et leurs conséquences dramatiques,
- À suspendre toute démarche collaborative, de programmation et de conventionnement avec les services de l’Etat, tant que le gouvernement n’aura pas infléchi sa position,
- À se mobiliser collectivement en date du 17 octobre après-midi à Strasbourg : Rendez-vous à 14h30 Place Kléber.» *Les intervenants de la rencontre de ce samedi 14 octobre 2017 à Strasbourg :
– - Denis RAMBAUD, président de l’Areal, association des organismes HLM d’Alsace, Président de la FNAR, Vice-président de Mulhouse Alsace Agglomération
- Philippe BIES, Adjoint au Maire de Strasbourg, Président de CUS HABITAT et d’Habitation Moderne,
- Edmond WOLFF, président de la CSF 67
- Jacky WAGNER, secrétaire général de la CGT 67
- Mme Christiane HEINTZ, secrétaire générale UDFO67
- Jean Luc WIEDEMANN président de la Fédération Française du Bâtiment 67
- Jean Marc SCHAFFNER, Président de la Fédération Française du Bâtiment Grand ESTFranck MAIRE Vice-Président Les Constructeurs Aménageurs 67
Mme Catherine HUMBERT, L’Union régionale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux