Une série d’incidents inquiétants survenus fin septembre et début octobre 2025 pousse les autorités européennes à renforcer leurs capacités de défense anti-drone. Mais s’agit-il d’un coup des Russes ou des Ukrainiens?

Des perturbations à répétition dans toute l’Europe
Plusieurs pays européens ont été confrontés à une multiplication inquiétante de survols de drones ces dernières semaines. En Allemagne, plusieurs aéroports, dont celui de Munich, ont dû être fermés brièvement début octobre après des signalements d’appareils non identifiés. Ces fermetures de pistes ont entraîné des annulations massives de vols et poussé le gouvernement allemand à annoncer la création d’une unité spécialisée de défense anti-drone, ainsi qu’un assouplissement des règles d’intervention.
La Scandinavie n’a pas été épargnée. Fin septembre, des survols non identifiés ont provoqué la suspension temporaire d’aéroports majeurs au Danemark et en Norvège, notamment ceux de Copenhague, Aalborg et Oslo. La multiplication de ces incidents a relancé les échanges d’informations au niveau européen et au sein de l’OTAN.
En France, la base militaire de Mourmelon-le-Grand, dans la Marne, a été survolée par plusieurs drones les 21 et 22 septembre. L’armée a confirmé l’incident et ouvert une enquête, sans toutefois établir publiquement s’il s’agissait d’appareils militaires ou d’un acte directement attribué à un acteur étranger.
La Belgique a également signalé des survols au-dessus de sites militaires et coordonne ses investigations avec ses voisins. Dans les pays baltes, notamment en Lituanie, des perturbations d’aéroports ont été causées par divers objets volants, dont des ballons utilisés pour la contrebande, illustrant la difficulté d’attribution sans preuves matérielles.
Plusieurs hypothèses
Face à ces incidents répétés, plusieurs explications sont envisagées par les autorités et les experts en sécurité.
L’hypothèse privilégiée est celle d’opérations destinées à tester les capacités de détection et les temps de réaction des défenses européennes. Le fait que plusieurs sites et pays aient été visés en peu de temps suggère une coordination qui dépasse le simple amateur. Certains officiels évoquent explicitement la possibilité de « tests de posture » menés par des acteurs malveillants.
La piste d’attaques hybrides ou d’actions d’intimidation par un État ou ses proxys est également envisagée, compte tenu du contexte géopolitique actuel et des tensions liées au conflit en Ukraine. Toutefois, l’attribution formelle requiert des preuves techniques – traces de commandes, trajectoires, récupération du matériel – qui manquent souvent.
L’espionnage et la collecte de renseignements constituent une autre motivation plausible. Les bases militaires abritent des informations sensibles sur les infrastructures, les mouvements de troupes et le matériel, que des drones équipés de caméras ou de capteurs pourraient aisément recueillir.
Les autorités n’écartent pas non plus l’hypothèse d’actes de malveillance perpétrés par des groupes non étatiques, des activistes ou même des individus isolés. Certains incidents passés en Europe se sont révélés être le fait d’utilisateurs amateurs ou de réseaux criminels.
Enfin, dans certains cas, il pourrait simplement s’agir de confusions avec des ballons, des planeurs ou de fausses alertes, même si cette explication ne semble pas prévaloir pour la majorité des incidents récents.
Renforcement des capacités de défense
Face à cette menace croissante, les autorités européennes multiplient les initiatives. Le renforcement des systèmes de détection est en cours, avec le déploiement de radars spécialisés, de capteurs acoustiques et de caméras infrarouges et optiques. Les échanges d’alertes entre agences nationales et internationales s’intensifient.
Sur le plan juridique, plusieurs gouvernements travaillent à clarifier les règles d’engagement : quand et comment neutraliser un drone intrus, que ce soit par tir direct, brouillage électronique ou interception par drone-chasseur. Ces mesures visent à donner aux forces de sécurité les moyens légaux d’agir rapidement.
Les enquêtes se poursuivent avec la collecte de traces vidéo, l’analyse des fréquences radio, les fouilles au sol et les interviews de témoins, dans l’espoir d’identifier les auteurs et, le cas échéant, de prononcer des sanctions.
Un défi d’attribution complexe
Les experts soulignent la difficulté d’attribuer formellement ces survols à un acteur précis sans preuve technique solide. Les motivations peuvent aller de la plaisanterie dangereuse aux tests stratégiques menés par un acteur géopolitique majeur.
Ce qui est certain, c’est que la tendance observée fin septembre et début octobre 2025 révèle une hausse d’incidents géographiquement coordonnés. Les autorités européennes prennent le phénomène au sérieux et accélèrent le développement de leurs moyens de défense face à cette menace aérienne nouvelle génération.
Depuis le début, tous les regards se sont tournés vers la Russie. Mais le chef du Kremlin a démenti tout envoi de drone sur les pays européens. Quel intérêt, pour la Russie, de mener des attaques frontales avec l’OTAN alors qu’elle a déjà fort à faire sur le front ukrainien? En revanche, l’Ukraine s’est spécialisée, au cours des derniers mois, dans la fabrication et l’utilisation des drones et des missiles. À tel point qu’elle est sur le point de devenir la « Silicon Valley » de la Défense grâce à la start-up Fire Point qui peut envoyer ses engins à plusieurs milliers de kilomètres. Aller titiller l’OTAN en laissant croire qu’il s’agit de manœuvres russes, pourrait pousser les Occidentaux à entrer dans le conflit russo-ukrainien…