Le Collectif Les Morts de la Rue tire la sonnette d’alarme avec son 13ᵉ rapport épidémiologique : la mortalité des personnes sans domicile atteint des niveaux sans précédent, avec une hausse de 16 % en un an.

La précarité tue, et de plus en plus. C’est le constat glaçant du rapport annuel « Dénombrer & décrire » publié ce jour par le Collectif Les Morts de la Rue. En 2024, 1 022 personnes sans chez-soi sont décédées en France, dont 912 étaient sans domicile au moment de leur mort. Une progression exponentielle qui marque une hausse de 16 % par rapport à l’année précédente et s’inscrit dans une tendance alarmante depuis 2012.
La crise humanitaire s’aggrave
Les chiffres révèlent l’ampleur du drame : 304 personnes vivaient dans la rue au moment de leur décès, 243 étaient hébergées, et pour 365 autres, la situation de rue ou d’hébergement n’a pu être établie avec certitude. Cette progression intervient alors que la Fondation pour le Logement estime à 350 000 le nombre de personnes sans domicile en France hexagonale, soit 20 000 de plus qu’en 2023.
Des vies fauchées 32 ans trop tôt
L’âge moyen au décès s’établit à 47,7 ans, soit 32 ans de moins que l’espérance de vie moyenne en France – un écart qui témoigne d’une mortalité prématurée massive. Si les hommes représentent 82 % des décès, la part des femmes (13 %) est en hausse, reflétant une féminisation préoccupante du »sans-abrisme ». Autre donnée inquiétante : 4 % des décès concernent des enfants de moins de 15 ans, un taux qui a doublé par rapport à la période 2012-2023.
Des parcours marqués par les ruptures
Le rapport met en lumière des trajectoires de vie fracturées : plus de 40 % des personnes décédées ont connu une rupture liée à la migration, 25 % souffraient d’une addiction aux substances illicites, 19 % d’une addiction à l’alcool. Fait particulièrement révélateur de l’échec des dispositifs de sortie de rue : 71 % étaient sans chez-soi depuis plus de cinq ans, dont 30 % depuis plus d’une décennie.
L’espace public, antichambre de la mort
Les lieux de décès sont eux-mêmes révélateurs d’une société en échec : 36 % des personnes vivaient dans la rue au moment de leur mort, une proportion en hausse. Près de la moitié (46 %) sont décédées dans l’espace public, souvent dans l’anonymat. Un tiers est mort dans des lieux de soins, après des années d’errance thérapeutique. Les moins de 25 ans meurent majoritairement dans la rue, tandis que les plus de 65 ans décèdent surtout en institution.
Des disparités territoriales marquées
L’Île-de-France concentre 37 % des décès. Les Hauts-de-France enregistrent un doublement avec 163 décès, notamment lors de traversées de la Manche. Les territoires ultramarins, comme Mayotte, restent largement sous-estimés : le cyclone Chido de décembre 2024 a révélé l’ampleur de l’invisibilité administrative et des vulnérabilités extrêmes dans ces zones.
Des causes de décès évitables
Quarante pour cent des causes de décès demeurent inconnues. Parmi les causes identifiées, 17 % sont des morts violentes (noyades, agressions, suicides). Les maladies chroniques touchent ces personnes bien plus jeunes qu’en population générale. Le rapport recense également 17 décès par hypothermie et 15 liés à des incendies en 2024.
Un appel à l’action
Le Collectif Les Morts de la Rue, qui s’appuie sur un réseau de partenaires institutionnels et associatifs, reconnaît que la couverture territoriale reste inégale. Les zones rurales et ultramarines demeurent moins bien documentées, et les populations les plus invisibles échappent encore au recensement.
Face à cette tragédie, le Collectif lance un appel urgent : protéger les plus vulnérables et réformer en profondeur les politiques publiques pour que le droit au logement convenable devienne enfin une réalité pour chaque personne en France hexagonale et dans les Outre-mer.
Résumé du 13ᵉ rapport des personnes mortes sans chez-soi en 2024
 
					