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Les mauvaises manières de Laurent Bigorgne

Ce Lorrain, ex-patron du prestigieux Institut Montaigne, proche de Macron, a été condamné ce jeudi à 12 mois de prison avec sursis pour avoir drogué son ex-belle-sœur et désormais ex-collaboratrice lors d’une soirée.

justice (DR)
justice (DR)

Le philosophe Michel de Montaigne doit se retourner dans sa tombe. Cet humaniste du 16ᵉ siècle qui a donné son nom à un Institut parisien qui se veut un « Think tank indépendant, une plateforme de réflexion, de propositions et d’expérimentations consacrée aux politiques publiques en France » où viennent briller les meilleurs esprits de l’intelligentsia, ne méritait pas l’affront qui vient de lui être fait.

« La drogue de l’amour »

Son ancien directeur, Laurent Bigorgne, 48 ans, originaire d’Épinal dans les Vosges, ancien prof d’histoire-géo à Nancy, a été condamné ce jeudi 8 décembre 2022 par le tribunal correctionnel de Paris à 12 mois de prison avec sursis et 2.000 euros d’amende. Il lui est reproché d’avoir drogué son ex-collaboratrice et ex-belle-sœur, Sophie Conrad qui fut Directrice générale adjointe (DGA) de la mairie de Nancy en 2018.
L’affaire remonte au 22 février 2022. Trois jours plus tard, Laurent Bigorgne est interpellé par la PJ de Paris et placé en garde à vue. Il reconnaît les faits. Il reconnaît avoir administré une drogue à sa collaboratrice, comme le confirmera l’expertise toxicologique de la plaignante. Elle a bien absorbé de la MDMA, une drogue de synthèse, qu’on appelle aussi « la drogue de l’amour ».
Pourtant, si Laurent Bigorgne reconnaît avoir drogué Sophie Conrad, lui avoir envoyé de nombreux SMS à caractère sexuel, il nie avoir voulu la violer. Le 27 février, Laurent Bigorgne a démissionné de l’Institut Montaigne.

Une requalification des faits

Au cours de l’audience, le 10 novembre 2022, le prévenu a reconnu avoir pris de la cocaïne, le soir des faits, mais a maintenu n’avoir pas voulu agresser sexuellement sa victime. « J’étais à 4 grammes de cocaïne par jour, j’en prenais toute la journée » avoue l’ex-patron de l’Institut Montaigne. J’étais devenu une machine, j’avais peur de dire que j’étais pris en défaut, d’être construit sur un mensonge, esclave psychologique et financier du produit. »
Le parquet avait alors requis 18 mois de prison avec sursis, sans retenir la tentative de viol.
En reconnaissant que Laurent Bigorgne avait « administré une substance nuisible » à Sophie Conrard « afin de commettre à son égard un viol ou une agression sexuelle », le tribunal a requalifié les faits qui auraient pu valoir au prévenu d’aller s’expliquer devant une cour d’assises.

Plainte contre le directeur de la PJ et la proc de paris

Cette affaire laisse un sentiment de malaise. D’abord par la nature des faits qui sont inqualifiables, surtout lorsqu’ils sont commis par des personnalités proches du pouvoir qui se croient au-dessus des lois. Ensuite, parce que les relations politiques du prévenu ont peut-être essayé d’entraver la police et la justice.
En effet, Sophie Conrard avait déposé plainte aussi pour tentative de viol, accusation rejetée par les juges d’instruction. Mais surtout, son avocat, Me Arié Alimi a dénoncé « une enquête sous influence » compte tenu des relations haut-placées du prévenu. Il a déposé plainte contre le directeur de la police judiciaire et la procureure de Paris pour être intervenus pendant la garde à vue.
De son côté, Médiapart s’est étonné que l’enquête soit bouclée en quatre jours.

Ancien prof à Nancy

Rappelons que Laurent Bigorgne, natif d’Epinal, dans les Vosges, a grandi en Meurthe-et-Moselle où son père était proviseur du lycée professionnel de Pompey.
Diplômé de l’IEP de Paris, prof dans un lycée de Nancy (il est agrégé d’histoire) Laurent Bigorgne, a été recruté à l’Institut Montaigne en 2009, sur l’insistance de Claude Bébéar. Proche d’Emmanuel Macron dont il est un ami, le directeur de l’Institut Montaigne a hébergé à son domicile personnel le siège du mouvement « En Marche » dont il est l’un des co-fondateurs. Il participera ensuite activement à la campagne électorale de 2017.
En juin 2018, il est nommé membre du Comité action publique 2022, installé par le Premier ministre Édouard Philippe, pour concevoir le projet de réforme de l’État. Bref, un très proche du pouvoir.
L’affaire n’est pas terminée. Il y aura un procès en appel.

 

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