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Affaire Alègre : le président de Stop à l’oubli est décédé

Gabriel Loubradou s’est battu jusqu’à son dernier souffle, dimanche soir, pour que la justice démasque tous ceux qui ont permis à des tueurs de la région Toulousaine d’agir en toute impunité.

Gabriel Loubradou (DR)
Gabriel Loubradou (DR)

Gabriel Loubradou est décédé dimanche soir d’une hémorragie cérébrale massive à l’âge de 83 ans. Quelques jours plus tôt, il donnait encore des interviews sur « l’affaire Alègre », du nom de ce tueur en série de Toulouse, condamné en 2002 pour cinq meurtres précédés de viols. Il a bénéficié d’un non-lieu dans cinq autres affaires de meurtres.
Mais le compte n’y est pas. L’enquête confiée à la Cellule Homicide 31, de la Section de Recherches Midi-Pyrénées de la gendarmerie, va révéler des dysfonctionnements graves au sein des institutions judiciaires et policières toulousaines : enquêtes bâclées, disparitions de scellés, meurtres classés en suicides, disparitions et meurtres non élucidés, refus d’entendre certains témoins, entraves à la recherche de la vérité de la part de médecins légistes, menaces, intimidations, insinuations…
La situation est gravissime. Dans le seul ressort du TGI de Toulouse, dans les années 1980 et 90, les gendarmes relèvent plus de 190 meurtres ou disparitions non élucidées ! Tous ne sont évidemment pas à mettre sur le compte de Patrice Alègre mais ils témoignent de la médiocrité des enquêtes sur chacune de ces affaires.
Sous l’impulsion de Gabriel Loubradou dont la fille, Hélène, a disparu le 16 août 1989, plusieurs familles de victimes se regroupent en 2004 pour jeter les bases d’une association qui s’appellera « Stop à l’Oubli ».

Le rapport Bréard

Gabriel Loudradou en sera le président. Un président à temps complet. Il ne vivra plus désormais que pour son association à la recherche de la vérité. Qui a aidé Patrice Alègre pendant toutes ces années d’impunité ? Qui l’a protégé ? Dans que but ?
Gabriel Loubradou rencontre beaucoup de monde, interroge de nombreux acteurs de cette triste période, enregistre des vidéos… Peu à peu, avec le temps, les langues se délient. Il reconstitue des réseaux, accumule des preuves. C’est ce dossier, patiemment constitué, que quelques journalistes parisiens voulaient connaître, quatre jours avant le décès de Gabriel.
Stop à l’oubli exige « que toute la lumière soit faite sur ces dysfonctionnements qui ont endeuillé tant de familles et souillé notre société et que les pièces du rapport Bréard soient versées dans les dossiers où elles seront très utiles à la manifestation de la vérité, confiait récemment le président de Stop à l’oubli. Que des sanctions soient prises à l’encontre de ceux qui ont failli à leur mission. »
Gabriel Loubradou laisse un grand vide autour des familles de victimes, à Toulouse et ailleurs. Mais son combat n’est pas terminé. D’autres ont d’ores et déjà décidé de reprendre le flambeau. Au nom d’une certaine idée de la justice.

Gabriel, un héros contre l’oubli…

Voici ce qu’écrit Yves Garric, ancien journaliste Toulousain sur son compte Facebook : « Il me plaît de penser que maintenant il sait. Où qu’il va savoir…

Savoir ce qu’est devenue Hélène, sa fille, disparue à Balma le 16 août 1989. L’une des quelque 197 victimes de meurtres ou disparus de la grande périphérie toulousaine, à la même époque, sur une période d’une vingtaine d’années.
Gabriel Loubradou fut de ceux qui fédérèrent les familles au sein de l’association « Stop à l’oubli » dont il aura été l’inlassable président jusqu’à son dernier souffle.
Des enquêtes plus qu’aberrantes, aux dires mêmes de certains magistrats. Des médecins légistes qui classèrent en suicides des affaires où le plus novice aurait tout de suite vu un meurtre comme devait l’établir les contre-expertises. L’une de ces médecins put même soustraire frauduleusement des pièces de son cabinet lors de la perquisition dont elle fit l’objet sans être le moins monde inquiétée par la « Justice ». Pratiquement tous les dossiers ont été refermés les uns après les autres sans avoir abouti.
C’est au milieu de cet océan de douleurs, de mauvaise foi, d’aberrations, d’iniquités, de découvertes horribles que s’est débattu Gabriel durant près d’un quart de siècle pour essayer de faire percer la vérité. Pour tenter de faire un peu bouger les juges.
Son éthique (la même dont il avait fait preuve en tant que maire-adjoint de Cahors) lui imposait de faire passer le dossier de sa fille Hélène après ceux des autres familles. Gravement malade, souffrant dans sa chair, il ne baissait pas les bras. Il avait une mémoire d’ordinateur qui lui permettait toutes les connections, tous les recoupements entre les différentes affaires.
C’est en tant que journaliste que l’avais rencontré. Il avait du reste commencé par m’envoyer sur les roses, en me disant que si je n’étais pas plus efficace que la plupart des confrères avec qui il avait eu affaire… Et puis rapidement nous étions devenus des amis. Gabriel s’est éteint ce dimanche soir à Cahors, à l’âge de 83 ans. Je l’aimais comme un frère. Durant mes quarante ans de carrière, j’ai rencontré un peu toutes les célébrités dans tous les domaines, présidents de la République, stars de la science ou du showbiss. C’est à quelques hommes tels que Gabriel que vont mon estime et mon admiration les plus ferventes.
C’est en principe samedi à Montcuq que seront célébrées ses obsèques. (Yves Garric) »

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