Dans son rapport 2017, le Secours Catholique a accompagné 1.438.000 personnes dont 767.000 adultes et 671.000 enfants. Il met en garde contre les préjugés inacceptables.
Alors que le scandale des Paradise Papers montre à quel point les plus riches trichent pour s’enrichir toujours plus, le Secours Catholique-Caritas France publie son rapport annuel sur la pauvreté. Il y a dans notre pays 2,3 millions de personnes qui vivent avec moins de 672 € par mois, 4 millions de mal-logés, près de 2 millions de bénéficiaires de l’aide alimentaire.
L’étude montre que les femmes sont dans une situation de plus en plus fragile. Cela s’explique par une proportion de plus en plus forte de femmes isolées (famille monoparentale). La précarité touche aussi des séniors isolés ainsi que de jeunes couples avec enfant (Ils représentent 24,2% des ménages en 2016, soit une augmentation de2% en cinq ans).
Trop de préjugés
L’association caritative met l’accent sur les préjugés aussi faux qu’inacceptables.
Premier préjugé : les pauvres font des enfants pour toucher les allocations familiales. Or un enfant coûte plus à une famille que les aides sociales cumulées.
Deuxième préjugé : les étrangers viennent profiter du système social française. Or, la précarité des ménages étrangers est souvent plus sévère que celle des ménages français. Troisième préjugé : on est moins pauvre lorsqu’on vit à la campagne. Rien n’est moins faux. Quatrième préjugé : si l’on cherche du travail, on en trouve. Cinquième préjugé : le chômage est la principale cause de pauvreté. C’est vrai et faux. Sixième préjugé : les pauvres préfèrent ne pas travailler. Or 32% des personnes accueillies au Secours Catholique sont des actifs !
Septième préjugé : les pauvres seraient des assistés et des fraudeurs. Enfin, huitième préjugé : les pauvres ne sauraient pas gérer leur budget.
Tout cela est faux mais contribue à poser un regard de méfiance à l’égard des plus pauvres et des plus démunis.
Plus dans le rapport statistique annuel 2017 sur la pauvreté du Secours Catholique-Caritas France
Dans le Grand Est
Les bénévoles du Secours Catholique dans la région ont rencontré 40 600 ménages en situation de pauvreté, contre 38 000 en 2015.
La part des personnes déjà connues reste stable à 36,1%, avec des disparités : d’un côté les Vosges, qui font face à des situations de pauvreté qui durent (46% de personnes déjà connues) et, de l’autre, la Champagne Sud (Aube, Haute-Marne), qui a rencontré 78% de nouvelles personnes.
En moyenne, 82,5 % des personnes sont orientées par les services sociaux, en particulier dans les délégations qui ont rencontré beaucoup de nouvelles personnes. Dans les Vosges, 53% des personnes sont orientées par les services sociaux. Celles déjà connues reviennent de leur propre initiative (41%) ou sur recommandation d’un organisme privé ou d’une autre équipe.
Concernant les besoins exprimés, on note une augmentation des demandes alimentaires en Meuse et Moselle (+ 6 points), demandes qui sont en revanche en baisse en Marne et Ardennes, en Alsace et en Champagne Sud, la plupart des départements y proposant de nouvelles activités et aides non distributives.
Les demandes d’aide aux démarches administratives sont en augmentation, en raison de la dématérialisation des services publics, souvent préjudiciable aux personnes en difficulté. En Alsace, dans les Vosges et en Marne et Ardennes, 15 à 21% des personnes expriment des problèmes de mobilité, une demande en augmentation de 3 points. En Marne et Ardennes, 38% des personnes formulent une demande d’aide au loyer.
Familles avec enfants
En termes de configuration des ménages, on observe une forte prédominance des familles avec enfants : 60% des situations concernent des ménages ayant au moins un enfant en 2016, part qui atteint son maximum (66%) dans les Vosges. Il s’agit bien souvent de mères seules (26,4% des situations).
Parmi les personnes seules, on note une majorité d’hommes : 20,4%, contre 14,2% de femmes. La plupart des enfants touchés par la pauvreté ont moins de 11 ans, un taux qui va de 64% des enfants accueillis en Meuse et Moselle à 73% en Meurthe-et-Moselle. Dans les Vosges, seulement 34% des personnes déclarent avoir un proche présent auprès d’elles, contre 64% en 2015, ce qui peut s’expliquer par la hausse de la proportion d’hommes seuls et de migrants.
Dans toute la région, la participation à des activités collectives augmente, jusqu’à plus de 30 points en Marne et Ardennes, ce qui s’explique par la hausse du nombre de groupes participatifs mis en place. La part des étrangers parmi les personnes rencontrées augmente, allant de 19 % à 34%, une hausse très forte dans les Vosges (+ 10 points), où les étrangers représentent désormais 22% des personnes accueillies.
Déboutés du droit d’asile
De par sa situation géographique, l’Alsace connaît comme les années précédentes une situation particulière, avec 47% d’étrangers. On dénombre toujours une forte proportion de personnes déboutées du droit d’asile ou en attente de statut (58,3% en moyenne sur la région).
Si dans toutes les délégations, les étrangers sont principalement originaires d’Europe de l’Est, en Champagne-Ardenne, les bénévoles rencontrent tout autant de personnes originaires d’Afrique. Les conditions de logement des personnes accueillies sont assez diverses, mais constantes d’une année à l’autre.
En Champagne Sud et en Meuse, 90% des personnes accueillies vivent dans un logement stable, contre 69% en Alsace, où une forte proportion d’étrangers sont sans statut. La part de personnes vivant dans un logement précaire a fortement augmenté en un an dans les Vosges (de 4% à 13%) et en Marne et Ardennes (de 10% à 18 %), en raison de la présence croissante de migrants vivant en centre d’hébergement et à l’hôtel.
Le taux de propriétaires en Champagne Sud est bien plus élevé (11 %, + 2 points par rapport à 2015) que la moyenne régionale (4 %). Du fait de la proximité du secteur Meuse et Moselle avec le Luxembourg, le taux d’effort lié au loyer y est nettement plus élevé : plus de 30 % du budget (– 2 points en un an). Les allocations logement y étant par ailleurs plus faibles qu’ailleurs (138 € en moyenne, contre 252 € dans les autres délégations) le loyer est la cause de 49 % des impayés, avec de grandes disparités entre le département de la Meuse et celui de la Moselle.
Loyers en baisse
Dans le reste de la région, notamment en Marne et Ardennes et en Meurthe-et-Moselle, les loyers sont en baisse. L’âge des personnes rencontrées reste constant. Les personnes de 60 ans et plus sont relativement peu représentées (8 % en moyenne).
Dans tous les départements, la grande majorité a entre 25 et 50 ans, soit une population potentiellement active. Or les personnes en emploi représentent seulement 12 % des personnes rencontrées dans les Vosges et en Alsace, un taux qui va jusqu’à 22 % en Champagne Sud. Au regard des situations professionnelles combinées, 44 % des couples ne comptent aucun actif dans les Vosges, 47 % en Meurthe-et-Moselle, contre 27 % en Champagne Sud.
Les délégations qui accueillent un fort taux d’étrangers sont celles où le taux de personnes sans droit au travail est le plus élevé : 14 % en Alsace, 11 % dans les Vosges (+ 8 points en un an). Les personnes bénéficiant d’une formation professionnelle sont très minoritaires (1 à 2 %).
La proportion de personnes sans aucunes ressources augmente dans toutes les délégations hormis en Alsace. La hausse est très marquée en Meurthe-et-Moselle (+ 7 points). La plupart des personnes perçoivent des transferts sociaux. Le revenu mensuel par unité de consommation est très variable d’un département à l’autre : 531 € dans les Vosges et 671 € en Marne et Ardennes.
La proportion de personnes bénéficiant de la CMU est faible en Moselle et en Alsace (6 % et 14 %), du fait du régime local, alors qu’elle est de 46 % dans les Vosges (– 9 points par rapport à 2015) et 36 % en Champagne Sud (– 4 points par rapport à 2015). La part des bénéficiaires de l’AME augmente (+ 2 points en moyenne par rapport à 2015), du fait de la hausse du nombre d’étrangers dans la plupart des départements.
La majorité des personnes sont en situation d’impayés (jusque 74 % en Marne et Ardennes), avec une baisse en Alsace depuis 2015 : de 69 % à 61 % des personnes. Moins de 20 % d’entre elles ont déposé un dossier de surendettement, en raison de la lourdeur de la procédure, et les montants des impayés sont inférieurs à 1 000 € dans 56 % des cas. La plupart sont liés au logement : loyer, gaz électricité, combustibles, eau. Si les factures d’eau semblent poser peu de problème en Alsace (5 % des impayés), elles sont plus fréquentes en Champagne Sud (22 %) et dans les Vosges (18 %).
Les cas de découverts bancaires sont aussi très variables : de 10 % en Marne et Ardennes à 29 % en Alsace.
Pour en savoir plus, vous pouvez consulter le rapport annuel sur la pauvreté dans le le Grand Est