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Scandale : le lobbying de Nestlé jusqu’au sommet de l’État

Des documents confidentiels obtenus par Radio France et Le Monde dévoilent comment Nestlé a réussi à obtenir des dérogations pour filtrer illégalement ses eaux en bouteille, malgré les alertes sanitaires et l’opposition de la Direction générale de la Santé.

Nestlé puise dans la nappe phréatique de Vittel 800 millions de litres d'eau par an (photo SumOfUs)
Nestlé puise dans la nappe phréatique de Vittel 800 millions de litres d’eau par an (photo SumOfUs)

Dans une affaire qui ébranle les plus hautes sphères de l’État français, une vaste opération de lobbying menée par le géant de l’agroalimentaire Nestlé a permis à l’entreprise de contourner la réglementation sur les eaux minérales naturelles, et ce, malgré des risques sanitaires avérés. Les échanges de mails, notes ministérielles et rapports d’inspection révèlent une chaîne de responsabilité politique remontant jusqu’aux plus hauts sommets de l’État.

Une contamination dissimulée depuis 2021

Tout commence en août 2021, lorsque Nestlé, inquiété par une enquête de la DGCCRF, organise une première rencontre avec le cabinet d’Agnès Pannier-Runacher, alors ministre de l’Industrie. L’entreprise utilise des filtres interdits dans ses usines pour traiter une eau qui s’avère contaminée par des bactéries fécales et autres polluants chimiques.

Un lobbying intensif auprès des plus hautes instances

Les documents révèlent des rencontres successives avec les conseillers d’Emmanuel Macron, d’Élisabeth Borne, de Bruno Le Maire et d’autres ministres. Le secrétaire général de l’Élysée, Alexis Kohler, reçoit lui-même les représentants de Nestlé. L’entreprise multiplie les pressions, notamment en brandissant la menace de suppressions d’emplois.

Les autorités sanitaires ignorées

Malgré les alertes répétées de la Direction générale de la Santé et de l’Anses sur les risques sanitaires, notamment viraux, et leurs recommandations de suspendre l’exploitation des sources, le gouvernement cède aux demandes de Nestlé en février 2023. L’entreprise obtient l’autorisation d’utiliser des filtres non conformes, en dépit des avertissements des experts sanitaires.

Une victoire du lobbying aux dépens de la santé publique

L’épilogue de cette affaire illustre la victoire du lobbying industriel sur les considérations de santé publique. Nestlé obtient gain de cause pour continuer à utiliser ses filtres controversés, et sa dirigeante, Muriel Lienau, est même promue présidente de Nestlé France dans la foulée. Les responsables politiques, confrontés à ces révélations, se renvoient aujourd’hui la responsabilité ou affirment ne pas se souvenir des détails de l’affaire.
Cette affaire met en lumière les mécanismes d’influence qui peuvent s’exercer au plus haut niveau de l’État, même lorsque la santé publique est en jeu. Elle soulève également des questions sur la transparence des processus décisionnels et la protection des consommateurs face aux intérêts des grandes entreprises.

 

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