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Clovis Cornillac : « La bienveillance est un super-pouvoir »

L’acteur-réalisateur incarne une sorte de « Forrest Gump », un gentil qui se décolore, et expose « une manière de voir la vie » dans son film « C’est magnifique ! ».

Clovis Cornillac incarne Pierre, qui n’a jamais quitté ses montagnes, où il parle aux abeilles et cultive les fleurs.

« C’est bath ! », s’exclame Pierre. Il n’y a pas que les expressions qui soient rétro chez Pierre, ses goûts, son look, sa coiffure, sa moustache, tout le ramène vers les années 50.  Pierre est « spécial », « pas comme les autres », c’est un gentil, capable de faire pousser des fleurs dans une grotte. « Pourquoi je serais pas sympa ? », se demande ce personnage dans « C’est magnifique ! », un film de Clovis Cornillac (sortie le 1er juin). « Je voulais un personnage bienveillant qui, lorsqu’il arrive dans des endroits, se fond comme un caméléon et rend les gens meilleurs », confiait l’acteur et réalisateur aux Rencontres du Cinéma de Gérardmer, où il était venu présenter ce film en avant-première.

C’est une fable, un conte (coécrit avec Tristan Schulmann et Lilou Fogli), qu’a réalisé Cornillac, après « Un peu, beaucoup, aveuglément », un « Belle et Sébastien », des épisodes de la série « Chefs », et avant « Couleurs de l’incendie » d’après le roman de Pierre Lemaître (sortie à la fin de l’année). Le comédien y incarne aussi le personnage principal, ce Pierre donc, qui jusqu’à quarante ans passés, a toujours vécu à l’écart de tout, n’est jamais allé nulle part ailleurs que dans ses montagnes, où il parle aux abeilles et cultive les fleurs.

« Une sorte d’hommage au cinéma »

Pierre a la candeur et la naïveté d’un « Forrest Gump » ; inadapté à la vie moderne, dont il ne sait rien, il part à la découverte du monde après la mort accidentelle du couple qui l’avait recueilli. Ignorant qu’il était un enfant adopté, il descend de la montagne, avec dans sa valise ses disques de Dario Moreno et « Le Petit Prince », pour rejoindre l’appartement lyonnais familial. Et surtout, retrouver ses parents et une identité puisque, administrativement, il n’existe pas. « C’est un super héros, Pierre ; il a un pouvoir absolu c’est qu’il est en osmose, le vrai grand pouvoir de super-héros aujourd’hui c’est cette bienveillance. La bienveillance, je pense que c’est un super-pouvoir, je vais mieux quand les gens vont mieux à côté de moi », estime Clovis Cornillac.

A Lyon, Pierre rencontre Anna, une autre exclue de la vie à laquelle Alice Pol donne sa « fraîcheur colérique ».

Bienveillant, Pierre l’est donc lorsqu’il rencontre Anna, une autre exclue de la vie à laquelle Alice Pol donne sa « fraîcheur colérique ». Ancienne alcoolique, une voiture pour maison, Anna a « quelque chose de cassé ». Ces deux-là vont s’entraider, à récupérer sa fille sa bataille dont Anna a perdu la garde, et à rechercher les parents de Pierre. Grand enfant qui a grandi dans une nature idyllique, sa découverte de la société contemporaine est assez cocasse, mais il applique un inaltérable bon sens près de chez lui.

Cornillac a créé un univers fantaisiste, poétique et graphique, autour de ce personnage singulier ; le récit se fait fantastique lorsque Pierre se décolore au fur et à mesure qu’il peine dans sa quête d’identité. Il devient d’abord tout jaune, sépia, puis noir-et-blanc, jusqu’à devenir invisible. « Il y a une sorte d’hommage au cinéma qui me plaisait, j’essaie quand je fais des films, sans aucune prétention, d’essayer de faire du cinéma, de donner une proposition qui soit la plus partageuse possible », précise le cinéaste, « Je fais beaucoup de préparation en amont, je dessine les décors et je fais le découpage de tout le film, avec les plans, les mouvements de caméra, les objectifs… C’est une forme d’écriture de cinéma, le film est écrit visuellement, je sais exactement où je veux aller ».

« Dario Moreno m’a toujours fasciné »

Logiquement, le film s’ouvre avec la chanson qui lui donne son titre, « C’est magnifique ! ». « Depuis que je suis gamin, Dario Moreno m’a toujours fasciné », raconte Cornillac, « Ce gars-là y va à fond, il avait un look dans les années 50, une petite moustache, une Cadillac rose, avec des chansons d’un swing à la Cole Porter, il y a ce côté joyeux, une joie de vivre et une image désuète et intemporelle. Il y a une manière de voir la vie, la gourmandise de quelque chose de simple et bienveillant, ça résumait très bien le personnage de Pierre, et l’énergie qu’il pouvait dégager ».

Au générique de ce film tourné dans sa bonne ville de Lyon (« Rarement filmée au cinéma, sauf dans les films d’époque », constate-t-il), on retrouve la famille de Clovis, mère (Myriam Boyer), père (Roger Cornillac), femme (Lilou Fogli), filles, fils. « Il y a beaucoup de gens de ma famille, mais j’ai trop d’amour pour le cinéma pour me dire que je fais un film de cinéma pour filmer ma famille, étrangement je m’en suis presque aperçu après », dit-il, « Ce qui compte le plus quand je tourne c’est le film, je suis obsédé par le film, par ce que j’ai envie de raconter, de faire, de partager avec le public ; ça ne m’intéresse pas de mettre mes amis, ma famille, mais quand ça correspond précisément ce serait absurde de dire non. Dans tous mes fims, mes enfants apparaissent, c’est juste un petit clin d’œil, un petit cadeau, un rendez-vous qu’on a ensemble que je trouve assez chouette. Et mon père, j’étais heureux parce que c’est un gars qui bosse dans un théâtre pas très reconnu, il se trouve qu’il a cette gueule du gars qui tient son bar, ça marche, il a une présence particulière ».

Comme la chanson et comme l’expression du titre, « C’est magnifique ! » est ainsi un film positif, doux, simple et généreux. « A un moment il faut dire aux gens qu’on aime qu’on les aime, c’est la chanson de Chedid, ça paraît crétin mais c’est super important », affirme Clovis Cornillac. « C’est bath ! », ajouterait Pierre.

Patrick TARDIT

« C’est magnifique ! », un film de Clovis Cornillac, avec Alice Pol (sortie le 1er juin).

Cornillac a créé un univers fantaisiste, poétique et graphique, autour d’un personnage singulier, et le récit va même se faire fantastique.
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