Après « L’ombre de Staline », la cinéaste Agnieszka Holland raconte « Le procès de l’herboriste », Jan Mikolasek, célèbre en Tchécoslovaquie.
Dans « L’ombre de Staline », la réalisatrice Agnieszka Holland passionnait les spectateurs avec l’histoire du journaliste Gareth Jones, qui avait révélé la famine ravageant l’Ukraine dans les années 1930, alors camouflée par le pouvoir soviétique. La cinéaste d’origine polonaise retourne dans l’histoire du XXème siècle, avec un autre destin individuel, celui de Jan Mikolasek, qu’elle raconte dans « Le procès de l’herboriste » (sortie le 30 juin).
« Je ne fais que soigner les gens », clamait Mikolasek (incarné par Ivan Trojan) dont le seul diplôme était celui d’un « expert herboriste ». Pourtant, toute la Tchécoslovaquie venait faire la queue devant la grande maison de « l’herboriste », dans l’espoir d’être enfin reçu en consultation. Dans la lumière, à la loupe, l’homme observait les urines apportées par ses nombreux patients, établissait un diagnostic qui se révélait juste en général, et soignait ses malades par les plantes. « Monsieur miracle » pour beaucoup ou charlatan à qui l’on promet la prison, il a servi et irrité les pouvoirs, a été maltraité par les nazis comme par les communistes.
D’innombrables patients reconnaissants
Arrêté une nuit par la police politique, emprisonné, Mikolasek eut droit à un procès en 1958 ; le film d’Agnieszka Holland est ainsi construit avec de (trop) nombreux flash-backs, depuis ses interrogatoires jusqu’à son passé, plus ou moins lointain ; sa jeunesse, auprès d’une guérisseuse dont il a tout appris, et qui a détecté en lui « le don » ; don grâce auquel il a sauvé la jambe gangrénée de sa sœur, promise à l’amputation. Son traumatisme de jeune soldat dans la Grande Guerre, réquisitionné pour un peloton d’exécution. Sa croyance, qui le conduit à s’agenouiller sur un tas de pierres au pied d’un crucifix. Pour expier ses péchés peut-être, puisqu’il cachait une relation homosexuelle et illégale avec son assistant.
Outre d’innombrables patients reconnaissants, il aura aussi soigné des dignitaires nazis pendant la Seconde Guerre Mondiale, puis un président tchécoslovaque communiste dont il était le protégé. C’est à la mort de celui-ci que le guérisseur doué, fortuné, et forcément jalousé, roulant dans une voiture américaine en république soviétique, est officiellement devenu « un charlatan ». Avec un tel personnage, traversant deux guerres et plusieurs régimes politiques, et une histoire forte, le récit qui en est fait est cependant austère et longuet, on comprend vite que « Le procès de l’herboriste » ne tournera pas à son avantage.
Patrick TARDIT
« Le procès de l’herboriste », un film d’Agnieszka Holland (sortie le 30 juin).