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« Brexit » voté, Cameron piégé : voici ce qui va arriver maintenant

Gavin Barrett, University College Dublin

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Chacun part de son côté. (Photo Pixabay.com)

Le Royaume-Uni a voté, jeudi 23 juin, sa sortie de l’Union européenne (UE). Ce choix impacte déjà les marchés et entraîne des conséquences politiques directes. David Cameron a annoncé qu’il quitterait son poste de premier ministre.

Juridiquement parlant cependant, le processus de sortie de l’Union prendra un certain temps. Le Royaume-Uni entre à présent dans une période de « Brexit » qui n’en est pas tout à fait un : il reste membre de l’UE, et le référendum n’a aucune valeur contraignante d’un point de vue légal. S’il ne s’agit que d’un avis consultatif, le résultat impose tout de même au gouvernement britannique un impératif politique : celui d’organiser la sortie effective de l’UE.

Une sortie à quel rythme ?

La loi qui régit des événements tels que le Brexit figure dans l’article 50 du Traité sur l’Union européenne. C’est une disposition que les États membres de l’UE ont adoptée en 2009 afin de se préparer à ce genre de scénario. Elle fixe une limite de deux ans aux négociations liées au retrait d’un pays. Une fois que ces deux ans se seront écoulés – ou avant, dans le cas où un accord aurait été trouvé et entrerait en vigueur pendant cette période –, le Royaume-Uni sera officiellement hors de l’UE.

L’article 50 stipule que le Royaume-Uni déclenche le processus de sortie en signalant son intention de se retirer par une notification. De là suivront non pas un, mais une multitude d’accords à approuver :

  • l’accord sur la sortie de l’UE, prévue par l’article 50 ;
  • un autre traité qui organisera les nouvelles relations du Royaume-Uni avec l’Union européenne – dont la négociation pourrait prendre des années, et qui nécessitera la ratification par chaque État membre de l’UE s’il s’étend au-delà du domaine commercial ;
  • des accords commerciaux entre le Royaume-Uni et les autres membres de l’OMC – c’est-à-dire jusqu’à 134 pays !
  • un traité visant à harmoniser les États de l’UE qui ôteront des textes européens toute référence au Royaume-Uni.

La première priorité sera, bien sûr, l’accord sur l’article 50.

Comment le divorce va avoir lieu ?

Ce sera sans doute la Commission européenne, branche exécutive de l’Union, qui négociera avec Londres au nom des 27 membres restants. Mais ceux-ci jetteront certainement un œil attentif aux négociations avant de voter l’accord.

Il s’agira d’un vote à la majorité qualifiée, en vertu duquel les voix des pays les plus importants – l’Allemagne, la France et l’Italie – compteront plus que celles des petits pays, même si en pratique de réels efforts sont faits pour s’assurer que les accords conviennent à chaque membre. Ensuite, si l’accord trouvé s’aventure au-delà des questions commerciales, tous les pays de l’UE devront le ratifier.

Des acteurs de poids pour des décisions lourdes.
Patrick Seeger/EPA

Le Parlement européen jouera également un rôle important puisqu’il possède un droit de veto. Les négociations autour de l’article 50 concerneront donc de nombreux acteurs de poids – et beaucoup d’entre eux pourraient ne pas faire de cadeau au Royaume-Uni, de peur d’insuffler des idées aux « exiteurs » de leur propre pays.

Le Royaume-Uni peut-il retarder la notification de l’article 50 ?

Légalement, oui : il peut attendre pour annoncer son intention d’enclencher le processus de sortie, voire même passer outre. Mais les autres États de l’UE refuseront probablement de négocier avant d’avoir reçu la notification.

Les partisans du Brexit ont suggéré un florilège de lois nationales qui permettraient au Royaume-Uni de court-circuiter l’article 50. Mais de telles mesures ne verront sans doute jamais le jour, car elles violeraient inutilement le droit européen et international, risqueraient de faire fuir de potentiels partenaires du Royaume-Uni et compromettraient ses futures relations avec l’Union européenne.

Le Royaume-Uni peut-il retirer sa notification ?

Si, par exemple, il n’aime pas la tournure que prennent les négociations, il pourrait tenter de le faire. Rien n’indique si c’est légal ou non, mais en tout cas, le Traité sur l’Union européenne ne l’interdit pas. Les réticences politiques ne manqueraient pas, mais cela pourrait se régler par un second référendum pour rejeter tout accord conclu autour de l’article 50.

Après tout, l’Irlande a bien changé d’avis sur les Traités de Lisbonne et de Nice, et le Danemark sur le Traité de Maastricht. De la même façon, la France et les Pays-Bas ont accepté un Traité de Lisbonne ressemblant au Traité constitutionnel de 1994, qu’ils avaient tous deux rejeté par référendum.

Qu’est-ce que le Royaume-Uni pourra obtenir ?

Cela dépend de qui mènera les négociations pour le Royaume-Uni – et de quelle façon –, et de ce que les autres pays seront prêts à lui offrir. Même en se montrant conciliant, le Royaume-Uni se retrouvera dans une position délicate.

Un Royaume-Uni hors-jeu.
Laurent Dubrule/EPA

Veut-il continuer à bénéficier de l’accès au marché unique et à ses 500 millions de consommateurs ? Si c’est le cas, il devra se soumettre aux mêmes conditions que la Norvège incluant notamment les paiements comptants pour garder ce privilège et l’immigration européenne sur son territoire. Souhaite-t-il barrer la route aux migrants ? Dans ce cas, il devra se résoudre à dire au revoir au marché unique européen.

Qu’importe sa décision, le Royaume-Uni se retrouvera inévitablement en dehors des sphères du pouvoir européen, pour la première fois en plus de 40 ans.

Y a-t-il un moyen de faire marche arrière ?

L’article 50 prévoit la possibilité que le Royaume-Uni entre à nouveau dans l’Union européenne un jour – possibilité conditionnée par le vote unanime de tous les États membres. Mais cela ne serait jouable que s’il acceptait l’euro, l’adhésion à l’espace Schengen et la libre circulation des personnes, et sans aucun remboursement.

Bienvenue dans le tout nouveau monde de Brexitland !

Traduit de l’anglais par Diane Frances.

The Conversation

Gavin Barrett, Associate Professor, Jean Monnet Professor of European Constitutional and Economic Law, University College Dublin

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.

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