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Pourquoi les enfants se plaignent-ils des longs trajets en voiture ou en train ?

voyages-enfants (UnlimPhotos)
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Ruth Ogden, Liverpool John Moores University

« Si je recevais 10 centimes à chaque fois que mon enfant lance “est-ce qu’on arrive bientôt ?”, je serais déjà riche » : c’est ce que peuvent se dire bien des parents à l’heure d’entreprendre un voyage en famille. Ayant moi-même trois jeunes enfants, je ne connais que trop cette crainte qui peut s’emparer de vous lorsque, à peine 30 minutes après le début d’un trajet qui doit durer cinq heures, l’interrogatoire commence.

Tout commence plutôt poliment. “Maman, quand est-ce qu’on arrive ?”, lance une petite voix depuis la banquette arrière de la voiture. Puis le ton se fait plus offensif et voilà qu’on commence à comparer la distance que j’avais annoncée une heure auparavant et celle qui reste encore à parcourir…

Quand le voyage se termine, j’ai en général pris la résolution de ne plus jamais partir avec les enfants en vacances. Mais pourquoi donc les trajets leur semblent-ils si atrocement longs ?

Perception des distances

L’une des explications est que notre expérience du temps évolue avec l’âge, ce qui se traduit souvent par la sensation que le temps passe plus vite à mesure que l’on vieillit. On aura ainsi l’impression que « Noël arrive plus vite chaque année ».

On suppose que cette impression d’un temps qui passe plus vite vient du fait qu’avec l’âge, chaque durée devient une proportion plus restreinte de notre vie. À 7 ans, par exemple, une année représente 14,30 % de votre vie tout entière. À 70 ans, cela ne correspond plus qu’à 1,43 % de votre vie. C’est ainsi qu’un voyage de cinq heures paraît bien plus impressionnant à un enfant de 5 ans qu’à une personne de 50 ans, tout simplement parce que cela équivaut à une part plus longue de sa vie.

Mais il y a d’autres éléments à prendre en compte. En grandissant, en vieillissant, nous comprenons ce qui relève des distances et de la géographie. Ce bagage de connaissances nous aide à trouver des repères et des indices pour évaluer où l’on se situe dans un voyage et le trajet qu’il reste à parcourir.

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Par exemple, si je vais de Paris à Amiens, je sais que nous entrons dans la dernière ligne droite du voyage quand nous dépassons Beauvais. Au Royaume-Uni, si je me rends de Manchester à Devon, je sais que je suis à peu près à mi-chemin lorsque nous quittons Birmingham. Ces informations m’aident à structurer le temps. J’ai également un GPS qui me donne un horaire d’arrivée, l’ajuste en temps réel, m’avertissant des obstacles et des retards éventuels. N’ayant pas directement accès à ces éléments factuels, les enfants dépendent de ce que leur diront les adultes pour estimer la progression du voyage.

Capacité d’attention

Les incertitudes auxquelles sont confrontés les enfants sont accentuées par le manque de contrôle dont ils disposent sur le voyage lui-même. Ce sont les adultes qui déterminent à quelle station-service on va s’arrêter et quel itinéraire on va prendre, ce qui peut leur donner l’impression que le trajet traîne en longueur.

En effet, l’incertitude temporelle, ou le sentiment de ne pas savoir quand quelque chose va se produire peut ralentir le passage du temps, et c’est un phénomène qu’on expérimente aussi à l’âge adulte.

Rappelez-vous la dernière fois que votre train s’est inexplicablement arrêté juste à la sortie de la gare, ou que vous avez vu le panneau « attente » clignoter sans fin devant la réception des bagages en sortant de l’avion. Je parie qu’aucun de ces problèmes n’a été résolu rapidement à vos yeux – et que vous auriez apprécié une annonce de la part du conducteur du train ou du personnel de l’aéroport. Le fait de ne pas savoir ce qui se passe nous donne l’impression que les événements s’éternisent.

Dès qu’apparaît un doute au sujet d’un délai, le contrôler va vite devenir notre objectif premier. L’être humain a en effet une capacité cognitive limitée et ne peut prêter attention à tout en permanence. Nous devons donc nous fixer des priorités selon les circonstances.

Quand un délai devient incertain, nous y prêtons beaucoup plus attention que la normale, ce qui se traduit par la sensation que le temps passe beaucoup plus lentement. Les enfants étant plus sujets à ces incertitudes que les adultes, sans distraction, ils vont scruter la progression du voyage, quel qu’il soit.

Ennui et divertissement

Enfin, si le temps passé en voiture peut s’éterniser pour les enfants, c’est tout simplement parce qu’ils sont enfermés et n’ont rien d’autre à faire que de regarder le paysage défiler par la fenêtre. Cette expérience les confronte à l’ennui alors que leurs parents, à l’avant, savourent probablement d’avoir un peu de temps pour rester assis et réfléchir.

Le désir de stimulation et de divertissement qu’éprouvent les enfants fait que cet ennui s’installe souvent rapidement, ce qui ralentit l’écoulement du temps. Comme l’incertitude temporelle, notre niveau d’ennui affecte notre perception des durées en modifiant l’attention que nous lui portons.

Dans ces cas-là, nous avons tendance à scruter l’horloge ce qui nous donne l’impression que le temps s’étire. À l’inverse, lorsque nous sommes joyeusement occupés, nous ne prêtons guère attention à l’heure, notre capacité d’attention étant accaparée par autre chose, et nous avons l’impression que le temps passe vite.

Alors, que doivent faire les parents ? Ceux d’entre vous qui ont un grand voyage en perspective se précipitent peut-être pour faire le plein de jeux et d’en-cas afin de fournir un flux constant de distractions à leurs enfants. Toutefois, je vous invite à la prudence. Si vous parvenez ainsi à réduire le refrain « on est bientôt arrivés ? », peut-être éveillez-vous là le risque d’une autre rengaine : « J’ai mal au cœur ! » Et quand un enfant a le mal des transports, l’expérience comme la recherche montrent que c’est aux parents que le voyage va sembler beaucoup plus longThe Conversation

Ruth Ogden, Reader in Experimental Psychology, Liverpool John Moores University

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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