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Expulsions locatives : pas de changement malgré la pandémie

À la Ciotat, une dame de 82 ans a été expulsée sans ménagement à la suite d’un conflit avec les propriétaires.

Un logement
La Ciotat (Photo d’illustration-DR)

Les expulsions locatives en France sont en principe très encadrées, elles le sont d’autant plus en ces temps d’urgence sanitaire. En effet, le 28 avril 2021, Marlène Schiappa et Emmanuelle Wargon ont rédigé une instruction transmise aux préfets de région pour préparer la reprise en « douceur » des expulsions fixées cette année au 31 mai 2021. Afin de « protéger les populations fragiles et vulnérables » les deux ministres demandaient la mise en place de mesures inédites envers ces personnes : éviter le plus possible d’exécuter ces actes et, en tout état de cause, aucune expulsion ne devait avoir lieu sans relogement ! Elles terminaient leur communiqué par une véritable profession de foi : « Le gouvernement est pleinement mobilisé pour protéger les ménages en difficulté en évitant la précarisation des locataires comme des propriétaires. »
Le gouvernement a-t-il été entendu par les préfets de région ?

Une expulsion musclée

Peut-être pas tous si l’on en croit l’histoire que raconte Carmela Aresu une résidente de la Ciotat, intervenue le 13 juillet 2021. Agée de 82 ans, cette locataire a été expulsée manu-militari d’un logement qu’elle occupe depuis 1978 au 27, avenue Cytharista à La Ciotat. Selon ses dires, une équipe de policiers équipés de gilets pare-balle l’ont interpellée alors qu’elle sortait de chez elle en voiture. Ils lui ont confisqué son téléphone. À l’intérieur de la maison, ouverte par un serrurier, un huissier de justice, un commissaire et un déménageur.
Ses affaires personnelles sont jetées dans les cartons. Le reste est emporté vers un garde-meuble. Quant à la vieille dame, traumatisée, elle est conduite dans une chambre d’hôtel.

Une plainte

Quelques jours après son expulsion et toujours sous le choc, Carméla Aresu a fait appel à une avocate pour la défendre. Me Véronique Truong, inscrite au barreau de Paris a déposé une plainte notamment pour « violation de domicile ». Elle affirme que le PV d’expulsion rédigé par l’huissier de justice ne comporterait pas la signature des intervenants (commissaire, serrurier, déménageur) et que la vieille dame aurait dû être relogée dignement.
L’affaire de Carméla commence il y a plus de 10 ans. Carméla Aresu exploitait une pizzeria avec son mari. Le couple avait signé un bail commercial au début des années 80 comprenant le fonds de commerce et un logement. Mais tout a changé au décès de son mari en 2009.

Dans une chambre d’hôtel

Le médiateur de La Ciotat qui suit ce dossier depuis plus de 10 ans nous a confié qu’à la mort de son mari, Mme Aresu a donné la pizzéria en gérance à des jeunes sans le sou pour leur mettre le pied à l’étrier. Ils ont développé l’affaire et acheté les murs. Carméla Aresu voulait être indemnisée de son fonds de commerce, mais elle a perdu tous ses procès. Elle a proposé une transaction menée par un avocat qui n’a pas aboutie. Le 20 mai 2011, un arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence a décidé de l’expulsion dans les conditions que l’on sait. Il y a plus de 10 ans.

En attendant, la vieille dame est hébergée par la mairie de La Ciotat. Ne lui parlez surtout pas de la protection des personnes vulnérables annoncée il y a quelques mois par Marlène Schiappa et Emmanuelle Wargon, vous la feriez rire. Ou plutôt pleurer.

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