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Destins de femmes à Mumbai

Grand Prix du Festival de Cannes, « All we imagine as light », réalisé par la cinéaste indienne Payal Kapadia, est un conte poétique et féministe.

Ce film évoque le statut des femmes indiennes, soumises au poids des traditions, des castes, de la religion…

Premier film indien sélectionné en compétition au Festival de Cannes depuis trente ans, « All we imagine as light » (sortie le 2 octobre) y a reçu le Grand Prix. Quelques années plus tôt, sa réalisatrice Payal Kapadia y avait été remarquée avec son documentaire « Toute une nuit sans savoir », primé à la Quinzaine des Cinéastes.

C’est à Mumbai, où elle est née, que la cinéaste indienne a tourné pendant la saison des pluies, donnant ainsi la beauté d’une lumière « gris bleu » à l’image de son film. « A Mumbai, il y a deux saisons, l’été et la mousson, c’est très compliqué d’y vivre pendant la saison des pluies, c’est une ville où les femmes viennent pour travailler, c’est un peu plus sûr pour elle, il y a du travail et de l’argent », précisait Payal Kapadia au Festival de Deauville, où « All we imagine as light » était présenté en avant-première.

C’est donc d’abord à Mumbai, « la cité des rêves », mégalopole surpeuplée et suragitée, où le temps est aspiré par la ville, qu’elle a filmé ses personnages dans un fourmillement trépidant de rues et de transports bondés. Un environnement étouffant où vivent deux infirmières venues du sud du pays, et qui habitent en colocation. Femme dévouée, Prabha est un mélange de force et de douceur ; elle n’a que peu de nouvelles de son époux parti en Allemagne quelque temps après leur mariage jusqu’à l’arrivée d’un colis, un autocuiseur made in Germany. Courtisée par un médecin, la sage trop sage Prabha mène une vie sans plaisirs ni désirs, s’interdisant toute futilité.

Un final lumineux au bord de la mer

La réalisatrice Payal Kapadia (à gauche), en compagnie de ses coproducteurs français, sur la scène du Festival de Deauville.

Tout l’inverse de sa jeune collègue Anu, plus joyeuse, plus libre ; dans l’insouciance de la jeunesse, l’Hindoue ne pense qu’à ses rendez-vous secrets avec son amoureux, musulman, malgré l’improbabilité de cette union. Ensemble, elles viennent en aide à une troisième plus âgée, Parvaty, menacée d’expulsion de son appartement, l’immeuble étant convoité par des spéculateurs immobiliers. Quittant Mumbai pour quelques jours, Prabha et Anu accompagnent Parvaty, qui a choisi de retourner dans son village au bord de la mer, où tout est bien plus calme, bien plus tranquille.

Coproduction française, ce film est un conte féministe, dans lequel Payal Kapadia évoque le statut des femmes indiennes qui, même si elles ont un emploi et un logement, disposent d’une certaine liberté et indépendance, sont quand même soumises au poids des traditions, des castes, de la religion, la pression familiale, les convenances… La réalisatrice montre cependant des femmes solidaires qui, malgré tout, tentent de maîtriser leur destinée, et c’est avec une lumière marine et une forme de poésie que se termine « All we imagine as light ».

Patrick TARDIT

« All we imagine as light », un film de Payal Kapadia (sortie le 2 octobre).

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