Entretien avec Philippe Randa, directeur du site de la réinformation européenne EuroLibertés, qui vient de publier La France macronisée, Le « quoi qu’il en coûte », de l’arnaque à la crise (Chroniques barbares XX), Préface de Jean-Pierre Brun…
(Propos recueillis par Guirec Sèvres)
Vous publiez le 20e volume de vos chroniques barbares intitulé La France macronisée ; le sous-titre est explicite : « Le « quoi qu’il en coûte », de l’arnaque à la crise »… Ne trouvez-vous donc rien de positif dans la politique menée par Emmanuel Macron et ses ministres ?
Et vous, pourriez-vous me citer une réalisation positive à porter à leur crédit ? Des déclarations d’intentions pour des lendemains qui chantent, certes, ses Ministres et lui en font à la pelle, on y est habitué, mais concrètement ? Un endettement abyssal, une inflation galopante, des services publics à la ramasse, une explosion de la délinquance, un système scolaire qui n’en est plus à s’effondrer, mais à s’enfoncer désormais sous le niveau de la croûte terrestre… Plus anxiogènes encore sont les multiples fractures dans la population : certes, quelles que soient les situations dramatiques, certains tirent leur épingle du jeu – et pas forcément tous de façon malhonnête ou immorale – mais la grande majorité de nos compatriotes a désormais le sentiment qu’on était plus heureux dans le passé que de nos jours, malgré des progrès techniques aussi incessants qu’insatisfaisants. Le fil rouge de la politique française, depuis plusieurs présidences, c’est le choix « nous ou pire que nous »… Hier, c’était « eux » ou la menace Lepéniste et ses hordes fantasmées de haineuses chemises brunes ; aujourd’hui, c’est « eux » ou la fureur mélenchoniste et une France transformée en immense ZAD avec miradors et guillotines à chaque coin de rue…
La loi sur la réforme des retraites est tout de même passée…
Non, elle n’est pas passée, justement, elle a été imposée avec le 49.3, c’est-à-dire un « bras d’honneur » politique… L’incompétence de ce gouvernement est telle qu’il avait réussi l’exploit que plus personne ne comprenant les modalités de cette réforme (les ministres eux-mêmes), une majorité de Français n’en ont plus voulu, même ceux qui n’y étaient pas forcément opposés, idem pour les parlementaires ; quant aux partis d’opposition, ils ont tous affirmé qu’ils reviendraient dessus une fois au Pouvoir. Certes, les politiciens nous ont habitués à ne pas tenir leurs promesses, mais on ne peut guère considérer ce triste épisode de la politique française comme positif pour le gouvernement macronien. Au contraire, déjà peu populaire, il ressort de l’aventure encore plus déconsidéré.
Les manifestations des syndicats et des partis de gauche s’essoufflent néanmoins…
Ils s’essoufflent d’autant plus qu’ils sont rendus inaudibles par les violences et les saccages des Black blocs, antifas et autres extrémistes de gauche qui, d’une part, font invariablement la Une des médias avant, pendant et après les manifestations, et qui, d’autre part, découragent nombre de Français de descendre dans la rue.
Vous pensez donc qu’ils font le jeu du Pouvoir ?
À l’évidence… et ce depuis la Présidence Hollande où ils sont apparus. Rien n’a jamais été fait pour les mettre hors d’état de nuire. À notre époque où tout le monde est « fliqué » via son smartphone, son ordinateur, les réseaux sociaux et autres joyeusetés techniques, ces dignes descendants de Ravachol, de Trotsky et de Cohn-Bendit circulent, agressent, vandalisent, harcèlent en toute impunité… Mais peut-être est-ce simplement une déformation de ma première vocation d’auteur de romans policiers d’appliquer à cette occasion l’adage « à qui profite le crime ? », me direz-vous.
Alors, quel avenir pour Emmanuel Macron ? Pensez-vous qu’il puisse ne pas terminer son quinquennat ?
Je commente des faits, fais des constats, envisage éventuellement des hypothèses possibles, à défaut de certaines, mais évite toutes prédictions hasardeuses.
Quelles hypothèses possibles d’avenir pour la Macronie, dans ce cas…
Il y en a plusieurs de plausibles, à commencer par quatre ans d’inaction, soit une simple gestion des affaires courantes sans projet, sans changement, sans but, sinon pour Emmanuel Macron de transmettre le flambeau du Pouvoir à une ou un successeur avec la simple conviction qu’« après lui le déluge »… Ou une dissolution de l’Assemblée ; beaucoup semblent l’avoir déjà oublié, mais des gouvernements de cohabitation, la France en a connu plusieurs sous les présidences de François Mitterrand et de Jacques Chirac… La possibilité d’une cohabitation avec une Marine Le Pen ou un Jean-Luc Mélenchon pourrait même lui permettre de rebondir si la situation s’aggravait rapidement en se présentant à nouveau – ce qu’il fait très bien – comme la seule alternative possible : lui ou – la preuve ! – pire que lui… Rappelons que cela lui a permis de l’emporter deux fois face à Marine Le Pen. Et si ce n’était pas un Premier ministre clivant qui entrait à Matignon, mais un ennuyeux « inodore et sans saveur », type François Fillon, Jean-Marc Ayrault, Jean Castex ou Élisabeth Borne, quelle que soit son étiquette politique, cela lui permettait de rester à l’Élysée jusqu’à sa retraite présidentielle avec toujours la même conviction qu’« après lui le déluge »…
Philippe Randa, chroniqueur politique et éditeur, est l’auteur de plus de 130 livres : romans, documents contemporains, biographies, dictionnaires historiques et littéraires, ainsi que d’essais politiques. Il est un ancien auditeur de l’Institut des Hautes Études de Défense Nationale. Il dirige le site de réinformation européenne EuroLibertés et collabore à la revue Synthèse nationale et au site du Nouveau Présent.
La France macronisée, Le « quoi qu’il en coûte », de l’arnaque à la crise (Chroniques barbares XX), Philippe Randa, Éditions Dualpha, 254 pages, 27 euros. ICI