Dans une lettre ouverte au Président de la République, trois associations du secteur consumériste dénoncent la baisse des subventions qui leur sont octroyées.
Monsieur Le Président,
Alors que le projet de loi de finances pour 2018 prévoit une baisse substantielle des subventions dédiées au secteur consumériste, et ce malgré l’adoption d’un amendement à l’Assemblée nationale visant à contenir la baisse initialement envisagée, permettez-nous de vous interpeller sur la nécessité de revoir l’affectation de ces financements dans le prolongement des rapports et préconisations de plusieurs autorités publiques.
Il nous parait en effet essentiel de soutenir le contrepouvoir que nos trois associations exercent face à des professionnels parfois peu scrupuleux et de rechercher, au profit des consommateurs, le meilleur usage des fonds dédiés à notre secteur.
Nos trois associations, à l’origine des plus grands combats consuméristes, reconnues par l’opinion publique et les autorités comme réellement représentatives et agissantes, perçoivent aujourd’hui moins de 20 % des financements dédiés au mouvement consommateur…
La cause consumériste fragilisée
A titre de comparaison, l’Institut National de la Consommation et les Centres Techniques Régionaux de la Consommation perçoivent 50 % des crédits de défense des consommateurs, alors même que l’Inspection Générale des Finances puis la Cour des Comptes se sont interrogées sur la pertinence de cette allocation de fonds.
La pluralité d’associations de consommateurs, loin de représenter une force, fragilise par ailleurs la cause consumériste, par une dispersion des crédits. L’absence de critères objectifs et transparents permettant de mesurer l’activité effective au service des consommateurs, amplifie cette atomisation comme différents rapports, dont le rapport Laurent, l’ont montré.
Dans ce contexte, vous comprendrez, Monsieur le Président, l’attachement de nos associations à revoir les modalités d’affectation des fonds du secteur consumériste, afin que soient valorisées et soutenues à leur juste valeur les actions effectives que nous menons tout en garantissant une meilleure efficacité de la dépense publique.
Baisse globale des crédits
Il nous semble donc essentiel que les quelques associations qui ont su soutenir et représenter le consommateur, maillon essentiel de notre économie, bénéficient d’un traitement plus favorable que les structures ou associations du paysage consumériste dont l’efficacité, à juste titre, a pu être questionnée. Un bon emploi de la dépense publique passe par une nécessaire rationalisation des équilibres en recentrant cette dépense sur les missions pour lesquelles le concours de l’Etat est indispensable et qui ne seraient pas réalisées par la seule initiative privée.
Vous l’aurez compris, notre inquiétude porte tout autant sur la baisse globale des crédits publics que sur les modalités d’affectation des crédits. En effet, si des sources de financements complémentaires doivent être trouvées par et pour les associations de consommateurs en s’inspirant d’autres Etats européens comme une taxe sur la publicité ou une fraction des amendes de l’Autorité de la concurrence, il importe, en tout état de cause, que les crédits publics alloués aux structures du paysage consumériste français obéissent à une logique en termes de représentativité et d’activité et donc d’efficacité.
Un acteur du marché
Amputer, selon une règle arithmétique, les financements des rares associations consuméristes réellement représentatives et agissantes anéantirait ce que la France a su construire au sein de l’Union européenne : une reconnaissance du consommateur comme acteur incontournable du marché.
Sans nos associations, aucune action de groupe ne serait actuellement menée, sur la seule année 2017, des dizaines de milliers de consommateurs n’auraient pas été accompagnés dans le règlement de leur différend, des centaines de milliers de consommateurs n’auraient pas été valablement informés avant de conclure un contrat de vente, de signer un état des lieux ou simplement avant d’aller remplir leur caddie.
Que dire des évolutions réglementaires et législatives permises ces dernières années en matière de communications électroniques, d’énergie, dans le domaine bancaire ou assurantiel, ou de notre implication dans l’éducation budgétaire, l’équilibre alimentaire ou encore la protection des données à caractère personnel….
Comptant sur votre souci d’une réelle rationalisation des dépenses publiques, et restant à disposition de vos conseillers pour discuter plus avant de cette réforme, nous vous prions de croire, Monsieur le Président, à l’assurance de notre plus haute considération.
Signataires :
Jean-Yves MANO, Président de la CLCV
Dominique MARMIER, Président de Familles Rurales
Alain BAZOT, Président de l’UFC-Que Choisir
Copie de cette lettre est adressée à MM. Edouard Philippe, Premier Ministre, et Benjamin Griveaux, Secrétaire d’Etat auprès du Ministre de l’Economie et des Finances.