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Nouvelle définition de l’antisémitisme

Une majorité de 154 député·e·s français·e·s vient d’adopter la résolution n°2403 visant à lutter contre l’antisémitisme proposée par Sylvain Maillard, malgré les nombreuses objections et mises en garde de la société civile.

L'assemblée nationale (DR)
L’assemblée nationale (DR)

La résolution adopte la « définition opérationnelle utilisée par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste » (IHRA). Or, depuis 2017, la CNCDH, (Commission nationale consultative des droits de l’Homme), rapporteur national indépendant sur la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie, s’oppose à cette définition qui vise « à amalgamer à du racisme la critique légitime d’un Etat et de sa politique, droit fondamental en démocratie » (voir aussi sa lettre envoyée le 26 novembre aux député·e·s). Des organisations anti-racistes telles que SOS racisme et la Ligue des droits de l’Homme ont également dénoncé la définition, exprimant des dangers pour la liberté d’expression et la lutte antiraciste. L’opposition est globale puisqu’elle existe au niveau européen mais aussi international. 40 organisations juives dans le monde ont publié, en 2018, un appel contre la définition de l’IHRA qu’elles considèrent conçue pour délégitimer les défenseur·e·s des droits des Palestinien·ne·s.

Antisionisme et antisémitisme

Enfin, le 2 décembre 2019, 127 universitaires juifs ont appelé les député·e·s français·e·s à rejeter la résolution Maillard dans une tribune publiée dans Le Monde, parce qu’elle adopte la définition de l’IHRA et qu’elle associe l’antisionisme à l’antisémitisme.

« Nous déplorons une telle instrumentalisation de l’antisémitisme au bénéfice d’un Etat tiers qui viole systématiquement les droits de l’Homme et le droit international et ce en toute impunité », déclare le Président de la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine François Leroux. « Au lieu de s’engager dans une lutte antiraciste sincère, les député·e·s qui ont soutenu cette résolution restreignent notre espace d’expression et d’action et cautionnent des organisations d’influence dont l’objectif premier n’est pas la lutte contre l’antisémitisme mais la délégitimation toute critique des politiques israéliennes ».

En effet, dans la promotion de sa résolution, Sylvain Maillard s’est entouré d’organisations proches du gouvernement israélien telles que ELNET (qui se veut être l’AIPAC européen) ou encore le Conseil régional de Judée et Samarie, organisation de colons israéliens extrémistes.

Les ONG françaises sont extrêmement inquiètes quant à leurs libertés d’expression et d‘action futures. Un simple coup d’œil chez les voisins européens qui ont adopté la définition de l’IHRA est à ce titre édifiant. Au Royaume-Uni par exemple, la définition a été utilisée à de nombreuses reprises pour réprimer ou censurer des événements de solidarité avec la Palestine, des étudiants et universitaires. Elle est devenue un instrument de propagande pour le gouvernement israélien face à toute critique ou mesure qui le dérange. Plus récemment, celui-ci a estimé que la politique européenne de différenciation – en particulier l’étiquetage des produits des colonies confirmé par une décision de la Cour de justice de l’UE le 12 novembre 2019 – était discriminatoire, sur les bases de la définition de l’IHRA (voir d’autres exemples ici).

Face à ces attaques, nos organisations continueront de défendre les droits des Palestinien·ne·s sur les bases du droit international et des droits de l’Homme comme elles le font depuis des décennies. Elles appellent les institutions françaises à prendre leurs distances avec la définition de l’IHRA, à défendre les libertés publiques et à s’engager dans une lutte sincère contre toutes les formes de racisme, y compris l’antisémitisme, en prenant appui sur les recommandations de SOS Racisme ou encore de la CNCDH.

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