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Retraites : Ne pas confondre égalité et uniformité

Point-de-vue. Dans son analyse sur la réforme des retraites publiée sur son blog, l’ancien secrétaire d’Etat au Budget, Christian Eckert, redoute des arrières pensées, comme le recours à des solutions individuelles de types assurance privées. Et avance quelques propositions.

Par Christian Eckert

Christian Eckert, ancien secrétaire d'Etat au Budget (DR)
Christian Eckert, ancien secrétaire d’Etat au Budget (DR)

Tout a été dit sur la maladresse du Gouvernement et sa façon d’imposer sa réforme des retraites. Inutile d’en rajouter. Mon propos de ce jour – et qui n’engage que moi – vise avant tout avec modestie à donner une analyse personnelle, à formuler quelques avis et à oser quelques propositions… Être critique n’exclut ni la possibilité ni la volonté d’être utile.
Le Gouvernement ne peut pas facilement faire croire à l’effondrement programmé du nos régimes de retraites. D’abord parce que c’est faux, comme je l’ai écrit dès septembre. Mon post a inspiré d’autres analystes et peut utilement être relu ici. Ensuite parce que les français sont loin d’être idiots : on ne peut pas sérieusement leur dire que le nouveau système ne fait pas baisser les pensions mais permet de mieux trouver l’équilibre sans augmenter les cotisations.

Ne pas confondre équité et uniformité

L’universalisation et la fin des régimes spéciaux est donc son principal argument. Cela fonctionne assez bien, pour les simples d’esprit qui confondent équité et uniformité. Comme si chercher l’égalité conduisait à ignorer les différences, la diversité et l’hétérogénéité des situations humaines. Comme si les conventions collectives étaient nées de rien et n’étaient pas le fruit d’un équilibre issu du dialogue social.

Je crains que d’autres arrières pensés n’existent aussi dans certains esprits gouvernementaux : à force d’instiller l’idée que le régime des retraites n’est ni juste ni durable, les solutions individuelles de types assurance privées pourraient naturellement être présentées comme le seul recours…Pour autant, le Gouvernement n’a pas remis en cause le principe de retraite par répartition. Soit…

Il répète en boucle qu’un euro cotisé donnera à chacun les mêmes droits. C’est séduisant, cela semble simple, mais c’est à côté de la plaque : au lieu de compter des trimestres de cotisation pour ouvrir les droits, le gouvernement propose de compter des points proportionnels (ou presque) au salaire perçu. On ne règle en rien les injustices que tout le monde reconnait : interruption de carrières pour les femmes ou les chômeurs, prise en compte de la pénibilité des métiers, du temps partiel souvent subi, différence d’espérance de vie en fonction des métiers… Le système actuel attribue des trimestres en plus pour tenir compte de ces cas particuliers… Le gouvernement ne propose pas clairement d’attribuer des points supplémentaires en fonction de ces situations particulières.

Consensus

On focalise sur la valeur du point pour déterminer le niveau de la pension. On devrait plutôt chercher à gommer les très nombreuses inégalités en jouant sur le nombre de points attribués. Il serait donc plus sage de remettre en chantier ce sujet avec un vrai débat global. On peut « en même temps » avancer sur quelques sujets qui pourraient faire consensus, comme par exemple:

  • Fixer un niveau minimal décent des pensions pour les carrières complètes. C’est d’ailleurs une proposition du rapport du haut commissaire.
  • Prévoir un système de réversion identique pour tous, qui ne diminue pour personne les droits actuels (ni en niveau, ni en âge d’attribution).
  • Aligner définitivement la revalorisation des pensions sur des critères préservant le pouvoir d’achat (inflation, salaires, croissance).
    Travailler sur la prise en compte des primes ou le niveau des salaires (pour les enseignants par exemple). Et pas sur un coin de table.

Traiter simultanément tous les sujets dans une ambiance anxiogène en imposant une réforme copernicienne n’est sûrement pas la solution. Quand un sujet est complexe (celui-ci l’est particulièrement), il vaut mieux chercher ce qui rassemble plutôt que pointer ce qui divise.

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