L’actrice incarne une femme quittée dans un film de Pedro Almodovar, court-métrage mais beau moment de cinéma.
Malgré l’actuelle fermeture des salles, pour une durée encore indéterminée, on peut quand même vivre un beau moment de cinéma avec le nouveau film de Pedro Almodovar, « La voix humaine » (« The human voice »). Un court-métrage d’une trentaine de minutes qui sort en dvd et vod le 19 mars (Pathé Films), très librement inspiré de la pièce de Jean Cocteau. Un exercice de style pour le réalisateur de « Talons aiguilles », « Tout sur ma mère », « La mauvaise éducation », « Volver », « Douleur et gloire »…
Une image superbe, des couleurs pétantes, on retrouve le style visuel du cinéaste espagnol qui tourne pour la première fois avec la comédienne écossaise Tilda Swinton. Une actrice unique dans un décor quasi unique, un appartement qui n’est en fait qu’un décor de cinéma dans un hangar. Tilda Swinton donne son physique atypique, sa « pâleur », son « mélange de folie et de mélancolie », à son personnage, une femme seule, abandonnée et désespérée, quittée par son amant il y a trois jours.
Trois jours que les valises de l’homme sont faites et prêtes à partir, après quatre années de bonheur. Trois jours qu’elle l’attend, qu’elle attend de ses nouvelles, mais il ne viendra même pas chercher lui-même ses bagages. En complet bleu, elle sort acheter une hache, avec laquelle elle va s’acharner sur le costume sombre de l’absent posé sur le lit ; en ensemble rouge, elle pioche dans les pilules entassées dans le tiroir de sa table de chevet. Même le chien est « comme une âme en peine ».
Elle est une femme au bord de la crise de nerfs, qui laisse s’exprimer son chagrin, sa colère, son envie de tuer cet homme qu’elle a « tant aimé ». Tilda Swinton porte « La voix humaine » dans une conversation au téléphone avec lui lorsqu’enfin il appelle ; un long monologue, tout en passant d’un envers du décor à un autre, mélangeant le théâtre et le cinéma, une fiction et une certaine réalité. « Je m’enfuis », dit-elle, car à la fin les femmes surmontent les épreuves chez Almodovar. Qui tourne son prochain long-métrage avec sa fidèle Penelope Cruz, « Madres paralelas », qu’on espère bien voir un jour sur un grand écran, dans une salle de cinéma.
Patrick TARDIT
« La voix humaine » (« The human voice »), un court-métrage de Pedro Almodovar, avec Tilda Swinton (sortie en dvd et vod le 19 mars/Pathé Films).
