Des chercheurs du CRPG (CNRS/Université de Lorraine), en collaboration avec l’Institut de Physique du Globe de Paris ont prélevé des échantillons de gaz dans divers sites volcaniques terrestres pour déterminer la provenance de notre atmosphère. Leur étude a été publiée dans Nature le jeudi 16 avril 2020.
Avec ses 78 % de diazote (N2) et ses 21 % de dioxygène (O2), l’atmosphère terrestre est un mélange unique dans le système solaire*. Le dioxygène a été produit par certains des premiers organismes vivants, mais d’où provient le diazote ? Nous provient-il du manteau terrestre grâce au volcanisme ? Était-il présent dès les premiers instants de notre planète ?
Pour tenter de répondre à ces questions, Jabrane Labidi, chercheur à l’Institut de physique du globe de Paris (CNRS/IPGP/IGN), Michael Broadley, David Bekaert et Bernard Marty, chercheurs au Centre de Recherches Pétrographiques et Géochimiques, Peter Barry ainsi que leurs collègues britanniques et italien, ont prélevé des échantillons de gaz dans divers sites volcaniques sur Terre, notamment en Eifel (Allemagne) et à Yellowstone (USA).
Une anomalie
Ce prélèvement a été permis grâce à une nouvelle instrumentation unique au monde, développée par Edward Young à l’Université de Californie à Los Angeles (USA) qui a mis en évidence une légère anomalie dans la composition de l’azote atmosphérique**. Cette anomalie permet d’identifier avec précision la contribution de l’azote dans des fluides volcaniques émanant à la surface de la Terre. Ces résultats, publiés le 16 Avril 2020 dans la revue Nature***, ont montré que le diazote provenant de magmas formés dans le manteau de la Terre ne présente pas cette anomalie.
Les auteurs ont pu ainsi caractériser les propriétés de l’azote présent dans le manteau terrestre et montrer que celui de l’atmosphère ne provient pas seulement du dégazage par les volcans. L’azote atmosphérique pourrait avoir été apporté par des corps extraterrestres (des astéroïdes qui gravitent entre Mars et Jupiter ou des comètes) de nature différente de celle des petites planètes à partir desquelles la Terre se serait formée.
* Sur Vénus comme sur Mars, l’atmosphère est essentiellement composée de CO2.
** Un élément chimique peut exister sous différentes versions, appelées isotopes, qui se distinguent par leur masse. Ainsi, trois variantes isotopiques du diazote existent dans la nature: 14N14N, 14N15N et plus rarement 15N15N. C’est l’abondance de cette dernière qui a permis de distinguer les origines mantellique et atmosphérique.
*** Hydrothermal 15N15N abundances constrain the origins of mantle nitrogen, J. Labidi, P.H. Barry, D.V.
Bekaert, M.W. Broadley, B. Marty, T. Giunta, O. Warr, B. Sherwood Lollar, T.P. Fischer, G. Avice, A.
Caracausi, C.J. Ballentine, S.A. Halldórsson, A. Stefánsson, M. D. Kurz, I.E. Kohl, E. D. Young. Nature,
580, 367–371 (2020). https://doi.org/10.1038/s41586-020-2173-4