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« Le temps d’aimer » et de vivre

Le film de Katell Quillévéré est un beau mélo, romanesque, l’histoire d’un amour entre deux personnes, honteuses et meurtries, jouées par Anaïs Demoustier et Vincent Lacoste.

Ce récit bénéficie d’une reconstitution soignée de l’après-guerre en France, jusque dans les années soixante.

« Chacun a son secret » dans « Le temps d’aimer » (sortie le 29 novembre), film réalisé par Katell Quillévéré (« Suzanne », « Réparer les vivants »…). Le secret de Madeleine (jouée par Anaïs Demoustier) est d’avoir été tondue à la Libération, une croix gammée tracée sur son ventre rond. Peu après, en 1947, fille-mère d’un petit garçon, elle est serveuse en costume traditionnel à l’Hôtel du Beau- Rivage, en Bretagne. Sur la plage, elle rencontre François (interprété par Vincent Lacoste), étudiant en archéologie, un peu boiteux (reste de polio), et fils d’une bonne famille bourgeoise du Nord.

C’est sans familles et entre deux témoins que ces deux-là se marient, l’époux adoptant et élevant comme son fils le petit Daniel, fils d’un officier allemand. Ce secret, Madeleine le cachera longtemps à son fiston, qui se sent mal-aimé de sa mère et recherche désespérément qui est son père. Quant au secret de François, son attirance pour les hommes, la jeune épouse ne le découvrira que plus tard.

Ce récit bénéficie d’une reconstitution soignée de l’après-guerre en France, notamment à Châteauroux, ville où est installée une base militaire américaine, et où le couple tient un bar-dancing, lieu de fête et de beuverie pour les soldats yankees. Plus tard, dans les années soixante, une petite fille est née, monsieur est désormais prof à la Sorbonne, il y a là toutes les apparences d’une famille traditionnelle et d’une vie parisienne aisée. Mais c’est aussi une époque, pas si lointaine, où des « penchants contre-nature » pouvaient conduire en prison.

Une façon de réparer les vivants

Katell Quillévéré, dont la famille est d’origine bretonne, a tourné notamment à Dinard et Locronan cette histoire inspirée de sa grand-mère ; celle-ci avait eu un enfant d’un soldat allemand, et avait rencontré plus tard son futur mari sur une plage. Avec l’expérimenté scénariste Gilles Taurand, la réalisatrice a brodé le reste de ce film sensible et touchant, romanesque, un beau mélodrame qui n’est jamais tire-larmes, osant même quelques scènes sensuelles, entrechoquant désir et frustration, l’histoire d’un amour.

« Le temps d’aimer » est aussi celui de beaux rôles pour Anaïs Demoustier et Vincent Lacoste, qui jouent deux personnes meurtries, rejetées par la société, chacun ayant une honte, une culpabilité, une faute, à cacher. Mais, femme vaillante et bon mari, c’est ensemble qu’ils vont avancer, prendre le temps de s’aimer, de vivre, et de réparer les vivants.

Patrick TARDIT

« Le temps d’aimer », un film de Katell Quillévéré, avec Anaïs Demoustier et Vincent Lacoste (sortie le 29 novembre).

C’est sans familles et entre deux témoins que se marient Madeleine et François, joués par Anaïs Demoustier et Vincent Lacoste (Photo Roger Arpajou).
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