C’est une belle histoire d’amour que jouent Fanny Ardant et Melvil Poupaud, dans le film de Carine Tardieu, où la tendresse et la passion n’ont pas d’âge.
« Je vais avoir 71 ans », prévient Shauna à Pierre, 45 ans, qui s’apprête à l’embrasser. Fanny Ardant et Melvil Poupaud incarnent « Les jeunes amants » du film réalisé par Carine Tardieu (sortie le 2 février). Cette histoire d’amour était le dernier projet de la cinéaste Solveig Anspach, qui s’était inspirée sa propre mère ; après la disparition prématurée de la réalisatrice, la coscénariste Agnès de Sacy l’a proposé à Carine Tardieu, qui a en commun avec Solveig Anspach de faire un cinéma « mélange d’humour et de gravité ». Et pas que : « La tête de maman », « Du vent dans les mollets », « Ôtez-moi d’un doute » pour l’une ; « Haut les cœurs », « Lulu femme nue », « L’effet aquatique » pour l’autre… Leurs films partagent bien des sujets, la famille, la tendresse, l’empathie, la féminité…
Quinze ans avant de s’embrasser, Shauna et Pierre s’étaient déjà rencontrés, furtivement : elle était au chevet de son amie mourante, dans un hôpital où il est médecin. Entre-temps, chacun avait poursuivi sa vie. Femme indépendante, « flamboyante », du genre « qui traverse l’existence sur la pointe des pieds », Shauna menait désormais une retraite plutôt solitaire. Et Pierre était toujours toubib dans le même hôpital, marié, deux enfants. Le hasard remet en présence, dans une maison irlandaise, la déjà vieille femme et l’encore jeune homme, qui vont se revoir à Paris et donc s’embrasser.
« Les choses arrivent », c’est comme ça, ils ne sont plus de si jeunes amants ; d’abord hésitante, Shauna se laisse emporter jusqu’à se comporter comme une adolescente amoureuse. Ce que remarque sa fille (jouée par Florence Loiret-Caille, actrice fétiche de Solveig Anspach). Lui est sûr de son amour, définitivement sous le charme de sa beauté, de sa fantaisie. Alors qu’il a tendance à tout perdre (objets, clés…), il est tout proche de perdre sa famille, son épouse (formidable Cécile de France), qui a d’abord un petit rire nerveux, cède un temps à la colère, avant de choisir d’être une femme trompée digne et bienveillante.
Le corps qui attire et le corps qui lâche
La tendresse et la passion n’ont pas d’âge dans ce film de Carine Tardieu, qui filme avec douceur les premiers baisers, avec délicatesse les premières caresses, et avec lenteur le temps qui passe. Avec la même sensibilité, la réalisatrice évoque le désir, le corps qui attire et le corps qui lâche, la maladie, la vieillesse, la peur, celle de l’amour comme celle de la mort. Bel instant de complicité également, lorsque mères et filles regardent ensemble une autre femme amoureuse, Annie Girardot, dans un film de Claude Lelouch, « Un homme qui me plaît ».
Cette sonate d’automne est forcément mélancolique, et ses interprètes particulièrement attachants. Contredisant l’adage qui veut qu’il n’y ait plus de beaux rôles pour les actrices de plus de cinquante ans, Fanny Ardant est une séduisante « lady of a certain age », prouvant qu’il y a encore de belles histoires d’amour pour une femme de plus de soixante-dix ans.
Patrick TARDIT
« Les jeunes amants », un film de Carine Tardieu, avec Fanny Ardant et Melvil Poupaud (sortie le 2 février).