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« La Finale » qui fait rire et pleurer

Thierry Lhermitte joue un « papy zinzin », malade d’Alzheimer, dans le touchant film de Robin Sykes.

Thierry Lhermitte et Rayane Bensetti, un grand-père et un petit-fils qui vont apprendre à se connaître.
Thierry Lhermitte et Rayane Bensetti, un grand-père et un petit-fils qui vont apprendre à se connaître.

Il n’est « pas mort, mais c’est tout comme », ce Roland incarné par Thierry Lhermitte dans « La Finale », premier film de Robin Sykes (sortie le 21 mars). Ancien restaurateur près du Parc des Princes à Paris, grand fan de foot, Roland se sent comme oublié sur le banc des remplaçants depuis qu’il vit avec la famille de sa fille, pour cause de maladie d’Alzheimer. Roland a en effet la mémoire qui flanche vraiment beaucoup.

JB son petit-fils (interprété par Rayane Bensetti ) n’accorde que peu d’importance à ce « papy zinzin » qui lui a piqué sa chambre ; jusqu’au grand jour de la finale de basket qu’il doit disputer, capitale pour lui. « Je suis parti sur l’idée de raconter l’histoire d’un grand-père et d’un petit-fils qui ne se connaissaient pas, et qui devaient apprendre à se découvrir, avec une grosse différence générationnelle, et de rapprocher ces deux générations », précise Robin Sykes, venu présenter le film à l’UGC à Nancy, en compagnie de Thierry Lhermitte.

Un film délicat, « émouvant et drôle »

Car, pour aller jouer sa finale, JB va devoir embarquer avec lui ce grand-père qui l’agace. « Il le traîne comme au boulet », ajoute le réalisateur, « Le grand-père ressemble beaucoup à mon grand-père, il est un peu franchouillard, avec des idées un peu racistes, qui sont maladroites et plus stupides que sincères, c’est culturel. Thierry Roland est la figure emblématique qui nous a inspirés pour écrire ce personnage ».

Film de duo, avec une partie road-movie et bien des péripéties, « La Finale » a reçu le Grand prix du Festival de la comédie de l’Alpe d’Huez, ainsi qu’un prix d’interprétation pour Thierry Lhermitte, qui y voit la reconnaissance d’un film « émouvant et drôle ». Car c’est une comédie qui va aussi faire pleurer, rappelant aux spectateurs le vécu de nombreuses familles. « Les gens nous disent que c’est des bonnes larmes aussi », confie Robin Sykes, qui est parvenu à réaliser un film touchant, empli de délicatesse, avec cette saleté d’Alzheimer.

« C’est une maladie sérieuse et il y a une limite à ne pas franchir », convient le cinéaste, qui a imaginé une très jolie fin, avec « la » finale, celle du 12 juillet 1998, où l’équipe de France de foot est devenue championne du monde. « C’est un film sur la différence de génération, la France d’hier et la France d’aujourd’hui », précise Robin Sykes, « Et s’il y a eu une époque qui nous a tous rassemblés c’était cette époque de la France black-blanc-beur qu’on a un peu oubliée, c’était un grand moment pour les sportifs, c’était il y a vingt ans, c’était un moyen de parler de la mémoire et du sport, de la mémoire individuelle et aussi de la mémoire collective ».

P.T.

« La Finale », un film de Robin Sykes, avec Thierry Lhermitte et Rayane Bensetti (sortie le 21 mars).

Thierry Lhermitte : « Cette maladie est une bombe à retardement »

Thierry Lhermitte et le réalisateur Robin Sykes. "C'est un rôle formidable", assure l'acteur, qui a reçu un Prix d'interprétation au Festival de l'Alpe d'Huez.
Thierry Lhermitte et le réalisateur Robin Sykes. « C’est un rôle formidable », assure l’acteur, qui a reçu un Prix d’interprétation au Festival de l’Alpe d’Huez.

Jouer l’âge, le vieillissement, la maladie, le regard perdu, ça fiche un coup ?

Thierry Lhermitte : Non, c’est super à jouer, c’est un rôle formidable, je me suis régalé tout le temps, vraiment. Ce qui est facile, c’est de jouer un rôle qui est bien écrit, il n’y a pas de difficultés particulières, franchement. Quand le rôle est cohérent, que les situations sont cohérentes, les dialogues le sont aussi, c’est plus facile que quand c’est mal écrit et qu’on est obligé d’inventer des trucs pour que les répliques se suivent.

Vous vous êtes informé sur la maladie d’Alzheimer ?

J’ai rencontré le père d’un ami, je voulais rencontrer quelqu’un qui était à ce stade de la maladie, pour savoir. J’imaginais bien ce que c’était mais je voulais voir quelqu’un à peu près à ce niveau-là, on a passé une demi-heure à discutailler, de façon un peu décousue à certains moments. Les gens ont Alzheimer avec leur caractère, suivant la zone qui se dégrade, suivant les endroits du cerveau qui sont touchés, c’est très varié ; au fur et à mesure ça s’étend à d’autres zones, et il y a d’autres déficits cognitifs qui arrivent. Quand on ne se reconnait plus, ça marque un stade.

« Les systèmes de santé vont exploser »

C’est un thème qui rejoint aussi votre engagement en faveur de la recherche médicale ?

Oui, mais c’est sans rapport, franchement. Le hasard a fait que je suis impliqué là-dedans mais si ça avait été un mauvais film, je ne l’aurais pas fait.

Mais dans le cadre de la Fondation pour la Recherche Médicale, vous avez rencontré des médecins, est-ce qu’ils donnent un peu d’espoir contre cette maladie ?

Le hasard a fait que j’ai été invité récemment à la Fondation Alzheimer, les avancées de guérison sont toujours des petits pas, mais il y a deux marqueurs biologiques qui marquent précocement la maladie, l’un dans le sang et l’autre dans le liquide céphalo-rachidien. Le président de la Fondation faisait remarquer qu’il faut absolument trouver avant vingt ou trente ans, parce que les systèmes de santé vont exploser, là où il y en a, à cause du nombre et du coût énorme de la maladie, c’est une bombe à retardement.

Est-ce que ce coût pourrait alors encourager l’industrie pharmaceutique à développer les recherches ?

Pour tout vous dire, ils cherchent énormément, simplement parce que c’est un problème de santé mondial et que c’est un marché monstrueux.  Malheureusement, c’est tellement un marché énorme que ça a handicapé la recherche. Il y a eu très peu d’essais sur des molécules, puisque dès qu’il y a eu un essai sur une molécule, tous les laboratoires se sont mis sur cette molécule pour être le premier à l’avoir ; du coup, ça n’a pas diversifié les voies, beaucoup de laboratoires ont arrêté les recherches parce que ça a été des échecs et que ça coûte des milliards. C’est à la fois un énorme marché et puis ça n’avance pas beaucoup, les essais cliniques coûtent monstrueusement cher. Mais ça avance, et il faut que ça avance.

« La recherche, c’est long et ça coûte cher »

Est-ce qu’il y a une hypothèse génétique dans cette maladie ?

Il y en a une petite, petite, partie, vraiment on est encore dans la description de la maladie aujourd’hui. On ne sait pas pourquoi ça se colle là, on connait les conséquences, donc il y a plusieurs voies pour soigner les conséquences, ce qui n’est déjà pas mal, on améliore ceci, on améliore cela, ça fait ralentir. Comme il n’y avait pas de marqueur, on ne savait jamais si c’était Alzheimer ; il y a eu deux publications avec deux marqueurs biologiques mais ça ne suffit pas pour que ce soit validé mondialement, il faut que d’autres aient fait les mêmes essais. Quand vous ratez un essai, la voie est oubliée pour quinze ans, ça se passe comme ça la recherche, c’est long, ça coûte très très cher, c’est très compliqué.

Vous tenez une chronique scientifique sur France Inter (un lundi par mois dans « Grand bien vous fasse »), vous aimez bien cet exercice et partager votre passion pour la science ?

Oui, comme je suis parrain de la Fondation pour la Recherche Médicale, ça suscite des dons et ça met les projecteurs sur les travaux des chercheurs. J’en parle très facilement, mais chaque fois que suis à l’émission d’Ali Rebeihi, il n’y a que des spécialistes du sujet dont je vais parler, donc je suis un peu plus sur des œufs, l’étendue de mon ignorance est gigantesque, croyez-moi.

Propos recueillis par Patrick TARDIT

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