Présenté au Festival de Deauville, le documentaire de Kevin Macdonald retrace le destin brisé d’une star, Whitney Houston.
Si le diable a souvent essayé d’attraper Whitney Houston, le documentaire que Kevin Macdonald lui consacre, « Whitney » (sortie le 5 septembre), constate que c’est bien le diable qui a gagné contre « la reine de la pop ». Le cinéaste, qui avait signé un formidable documentaire sur Bob Marley, montre combien la chanteuse du tube mythique « I will always love you » fut victime des siens, combien sa gloire et son argent étaient une affaire de famille.
Certes, ce film présenté au Festival du Cinéma Américain de Deauville, après avoir été sélectionné au Festival de Cannes, rappelle que Whitney Houston avait une voix incroyable et qu’elle était jolie. Mais le masque cachait une histoire terrible. Dès son enfance dans le ghetto de Newark, sa mère Cissy lui a appris à chanter, l’a fait répéter, l’a poussée, l’a préparée à faire carrière. Cissy elle aussi avait été chanteuse, choriste réputée, notamment pour Presley. D’ailleurs, un autre documentaire présenté au Festival de Deauville, « Elvis Presley : the searcher », montre également la gloire et la déchéance d’une star mondiale, comment d’autres contrôlent la carrière des artistes, et profitent d’eux. C’est pathétique et à chaque fois un immense gâchis.
Elvis a eu son colonel Parker, Whitney avait son père. Pourtant divorcé depuis longtemps de sa mère, il est vite revenu lorsque sa fille chérie devenait une superstar, volée, escroquée et poursuivie en justice par ce vieil homme indigne. Elle n’est pas allée à son enterrement.
Dans la famille Houston, les frères, qui l’ont initiée dès sa jeunesse à la drogue ; elle en est morte en 2012, elle avait 48 ans. Il y a le mari aussi, le rappeur Bobby Brown, à l’influence malsaine, et jaloux de Robyn, l’amie/amante/assistante de Whitney dont elle a toujours pris soin. Et puis aussi, ce que l’on apprend dans la toute dernière partie du film, il y a cette cousine, Dee Dee Warwick, qui avait agressé sexuellement la petite Whitney et un de ses frères.
Enfin, il y a la fille, dont la star ne s’est jamais vraiment occupée, suicidaire, alcoolique, droguée, elle aussi retrouvée inconsciente dans une baignoire, à 22 ans, trois ans après la mort de sa mère. Quelle famille !
« La coupable, c’est moi »
Si le diable lui a joué des tours, quelques fées avaient pourtant offert à Whitney Houston la voix et le charme. Enfant, elle chantait « avec le coeur » du gospel à l’église, a eu « une bonne éducation » dans une école catholique, loin de la rue. La star des années 80 remplit les stades. En 1999, la « black princess » chante l’hymne américain, The Star Spangled Banner, au Super Bowl. Au cinéma, elle triomphe dans « Bodyguard » avec Kevin Costner ; plus que la romance entre une star et son garde du corps, c’est l’histoire d’amour entre une femme noire et un homme blanc, dans l’Amérique de Reagan.
Et puis il y a les cures de désintox, le divorce, les tabloïds inquisiteurs, les concerts ratés, une spirale autodestructrice… « La coupable, c’est moi », disait Whitney Houston dans un grand sourire, lors d’une interview télé où elle était sommée de s’expliquer sur ses « problèmes de drogue ». Le film de Kevin Macdonald montre qu’elle fut bien plus victime que coupable.
Patrick TARDIT
« Whitney », un documentaire de Kevin Macdonald (sortie le 5 septembre).