Au terme d’un d’une heure et demi d’échanges courtois, le challenger Alain Juppé n’a pas réussi à inverser la dynamique en faveur du favori François Fillon. Rendez-vous dimanche 27 novembre dans les urnes.
Le dernier débat de la primaire de la droite et du centre a opposé, ce jeudi 23 novembre 2016, deux candidats certes pugnaces mais très courtois. Pas d’attaque frontale, pas de gros mots. Tout en retenue calculée car, après le second tour de scrutin, dimanche 27 novembre, il faudra bien se rabibocher autour du vainqueur qui portera les couleurs de la famille Les Républicains pour la présidentielle de 2017. Même si, quand même, Alain Juppé qui a un énorme retard de voix sur François Fillon est apparu plus offensif, plus mordant que son concurrent qui, lui, affichait une quiétude de bon aloi. Quelques escarmouches, quand même, sur l’avortement, les retraites, la suppression des fonctionnaires, la réduction des impôts…
Pendant un peu plus d’une heure et demi, Alain Juppé et François Fillon ont donc déroulé leur programme en répondant aux questions des journalistes. Au vrai, leurs programmes sont quand même très proches. Même si la méthode de mise en œuvre peut sembler un peu différente.
« Rien à négocier »
Petite explication lorsqu’il s’est agi de savoir si le futur président de la République accepterait des ministres mis en examen. Les élus ou les ministres « ne sont pas des citoyens comme les autres », a expliqué Fillon. « Ils ont pour mission de montrer le chemin. »
Juppé a pris ça pour une attaque personnelle. « J’ai été condamné, j’ai payé. J’entends faire appliquer les règles qui existent ».
En fait, François Fillon ne visait pas Juppé mais… Sarkozy.
Une question sur le modèle social français. Fillon : « Il prend l’eau de toute part… La meilleure politique sociale, c’est l’emploi.
Juppé confirme : « La principale menace, c’est la politique conduite depuis cinq ans. »
Le système de santé ? Fillon veut « désétatiser » le système de santé, faire sauter le système du numerus clausus quand Juppé veut une meilleure répartition des médecins sur tout le territoire national.
Le code du travail ? « Tous les pays qui réussissent et qui sont au plein emploi sont ceux où les règles d’embauche et de licenciement sont plus simples » assure Fillon. « Je veux laisser les salariés négocier le temps de travail. Le dialogue social est inexistant dans les entreprises car il n’y a rien à négocier. »
L’avortement en question
Si François Fillon souhaite augmenter le temps de travail, y compris pour les fonctionnaires, Alain Juppé trouve « injuste » de demander à des fonctionnaires de travailler 39 heures payées 35. Autre point de désaccord la suppression du nombre de fonctionnaires : moins 500.000 en cinq ans pour Fillon, moins 250.000 pour Juppé.
Encore un point de friction : la fiscalité. « Je mets le paquet sur la baisse des charges et quand l’économie repartira on refondera la fiscalité » assure Fillon. Réponse de Juppé : « Beaucoup de Français ont été conduits à quitter la France à cause des impôts confiscatoires. Les Français qui ont de l’argent vont investir ailleurs. » Bref, il faut « relancer l’économie » assurent les deux.
C’est sur un sujet de société que les deux débatteurs se sont accrochés : celui de l’avortement. « On me fait des procès sur ce sujet, constate Fillon. Je ne toucherai rien dans ce domaine, c’est la loi Veil, j’ai une grande admiration pour cette dame. »
Juppé : « Je ne fais pas de procès mais moi je pense que c’est un droit fondamental ». Puis, le maire de Bordeaux se fâche contre ceux qui ont mené une campagne « ignominieuse. On m’a appelé Ali Juppé, grand mufti de Bordeaux. On m’a accusé de financer une mosquée qui n’existe pas, puis d’être antisémite puis salafiste… Cette campagne m’a fait beaucoup de mal. Je n’ai jamais entendu un seul de tes lieutenants condamner cette campagne. J’ai été attaqué par Riposte laïque (d’extrême droite- NDLR) » dit-il à son rival.
Réponse du berger à la bergère: » Je ne connais pas cette organisation, je n’ai rien à voir avec cette attaque… Mais il ne faut pas exagérer non plus. Quand je me fais traiter d’homophobe tous les matins, je ne t’ai pas entendu prendre ma défense, ni tes lieutenants. »
Petites différentes sur le mariage pour tous, sur l’enseignement de l’Histoire, sur la politique internationale et les relations avec la Russie que Fillon souhaite normaliser, sur l’Europe et, enfin, sur le Front national que tous ceux veulent combattre.
Au final ? Rien de bien saillant, si ce n’est une apparence aisance de François Fillon dans ce débat, une impression que Juppé était à la peine voulant à tout prix éviter la faute, l’écart de langage, l’erreur qui tue. Pas de gagnant, pas de vainqueur. Mais un petit avantage pour Fillon tout de même.
M.G.