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Ce que représente vraiment la France dans l’économie mondiale

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Paris, capitale économique et politique de la France.
Miroslav Petrasko/Flickr, CC BY-NC-ND

Hugues Poissonnier, Grenoble École de Management (GEM)

Après l’euphorie temporaire qui a suivi la dernière élection présidentielle, en cette période de rentrée les vieux travers empreints de pessimisme reviennent. La presse économique regorge d’articles alarmistes sur le déclin de l’économie française, la France étant parfois présentée comme une « puissance immergente » (la notion d’« immergence » ou de « pays immergeant » apparaît dans une tribune de A. Dupui-Castérès dans Le Monde en 2010 avant d’être reprise en 2012 par B. Dugué et en 2013 par C. Benoît (Huffington Post).

Bien sûr, les sujets de préoccupation sont souvent réels et légitimes. Dans bien des cas cependant, la surréaction est devenue la norme. Quelques chiffres (quoique toujours discutables) aident à y voir plus clair.

La France, bientôt 5e puissance économique mondiale

Avec moins de 1 % de la population mondiale (67 millions de personnes, 22ᵉ rang sur ce critère) et 0,45 % de la surface (41ᵉ rang mondial), le fait que la France demeure la 5ᵉ puissance économique mondiale, devant l’Inde, constitue déjà une réelle performance – bien qu’elle ait gagné une place à la faveur du décrochage du Royaume-Uni, plombé par le Brexit et la chute de la livre sterling.

Il est vrai que de tels classements méritent bien les critiques qui sont formulées à leur égard, notamment celle, la plus évidente, de reposer sur le PIB, indicateur dont j’ai pointé les limites dans une récente tribune (et effets pervers).

Si nos entreprises, qui réalisaient encore 6,5 % des exportations mondiales de biens et services au début des années 1990 n’en réalisent plus que 3,5 % aujourd’hui, la France reste la 7ᵉ puissance exportatrice mondiale. Un classement lui aussi étonnant pour un observateur qui se bornerait à lire les principaux titres de la presse économique…

Les grandes entreprises françaises : sources de difficultés et planche de salut

Le manque d’entreprises de tailles intermédiaires (ETI) dans l’économie française est souvent présenté comme une cause du déficit du commerce extérieur autant que comme une conséquence des relations difficiles qu’entretiennent ces ETI avec nos grandes entreprises.

Le caractère multinational de ces dernières témoigne de leur volonté de trouver à l’international, plutôt que sur le territoire national, les principaux moteurs de leur croissance. La production délocalisée représente 2,5 fois les exportations françaises. Ce chiffre s’avère très élevé si on le compare à ceux que l’on observe en Allemagne (1,45 fois) ou en Espagne (0,70 fois).

Certes ces productions réalisées à l’étranger ne contribuent pas à améliorer la balance commerciale, mais elles génèrent des revenus pour l’ensemble de notre économie et de nos entreprises.

L’économie mondiale en 2050

Au-delà du gain annoncé d’une place dans le classement (due aux difficultés passagères du Royaume-Uni), il est toujours intéressant d’adopter une vision à plus long terme. Cette dernière confirme le déplacement du centre de gravité de l’économie mondiale des pays dits développés aux pays émergents.

Les pays de l’E7 (Chine, Inde, Brésil, Indonésie, Mexique, Russie, Turquie) devraient représenter 50 % de l’économie mondiale en 2050, quand les pays du G7 (États-Unis, Canada, Royaume-Uni, France, Allemagne, Italie, Japon) n’en représenteront plus que 20 %. Bien sûr, une partie de l’évolution du poids dans l’économie mondiale de ces deux groupes s’explique par la dynamique démographique (les pays de l’E7 représentent plus de trois milliards d’habitants contre moins d’un milliard pour les pays du G7). Il n’empêche que l’analyse de l’évolution des PIB par habitant tend à confirmer la place croissante des pays de l’E7, indépendamment de leur poids démographique.

Peu de travaux prospectifs se focalisent sur des critères alternatifs au PIB, comme le bonheur intérieur brut : c’est sans doute pourtant le premier levier de prise de distance avec la vision du déclin annoncé.

Pour une remise en cause salutaire des critères de classement

Le jeu de la course à la puissance économique passe, nous l’avons vu, par l’augmentation du PIB et la recherche pure et simple de la croissance économique. Il est possible et salutaire de jouer un autre jeu : celui de la recherche d’autres finalités que la croissance.

Le contenu en emploi de la croissance et le contenu en mieux-être des emplois sont bien trop ignorés et absents des débats. Nombreux sont pourtant les exemples de pays affichant des taux de croissance élevés sans réduction du chômage (l’inverse est vrai également).

The ConversationLe plein-emploi n’est pas non plus le garant d’un supplément de bonheur. Cumuler deux ou trois jobs devient de plus en plus courant, dans de nombreux pays, avec des effets évidemment délétères sur la qualité de vie. La vraie puissance consiste sans doute, plus qu’on ne le dit, à maintenir ou à améliorer cette qualité de vie.

Hugues Poissonnier, Professeur d’économie et de management, Directeur de la Recherche de l’IRIMA, Membre de la Chaire Mindfulness, Bien-Etre au travail et Paix Economique, Grenoble École de Management (GEM)

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.

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