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Macron : une certaine idée de la France

« Ce que nous avons à accomplir, c’est une véritable révolution » a affirmé le président de la République au terme d’un discours d’une heure trente.

Emmanuel Macron devant les parlementaires réunis en congrès (capture EuroNews)
Emmanuel Macron devant les parlementaires réunis en congrès (capture EuroNews)

D’un ton souvent lyrique, presque ‘’habité’’, Emmanuel Macron s’est exprimé une heure et trente durant devant les parlementaires réunis en congrès à Versailles. Pour leur dire quoi ? Pour leur donner un cap, un horizon, une vision de la France qu’il souhaite car il en a reçu le mandat du peuple français. Emmanuel Macron entend ainsi fixer le point de départ de la nécessaire transformation du pays et inscrire son mandat entre les années agitées (sous Sarkozy) et les années immobiles (sous Hollande). Transformation du pays qui passera par un certain nombre de réformes.

« L’esprit de conquête »

Voici les phrases-clés du discours du président.

« Ce qui nous est demandé par le peuple, c’est de renouer avec l’esprit de conquête qui l’a fait pour enfin le réconcilier avec lui-même… Elle est là, notre mission historique. Notre mission n’est pas dévolue à un petit nombre, mais à tous.
Je refuse de choisir entre l’ambition et l’esprit de justice. Je refuse ce dogme que pour bâtir l’égalité, il faut refuser l’excellence. Le sel de notre République est de savoir conjuguer ces exigences.
Le mandat du peuple c’est enfin de la fidélité historique. Les Français demandent à leur gouvernement d’être fidèle à l’histoire de la France, encore faut-il s’entendre sur le sens de ces mots. Ces dernières années l’histoire a été prise en otage par le débat politique…

Le roman national

Il n’appartient pas au pouvoir exécutif ou législatif de décréter le roman national, qu’on veuille lui donner une forme réactionnaire ou progressiste. Cela ne veut pas dire que l’histoire de France n’existe pas, qu’il ne faut pas en être fier, qu’il ne faut pas la regarder avec ses grandeurs et ses bassesses. »

Réduction du nombre de parlementaires

« La loi n’est pas faite pour accompagner servilement les petits pas de la vie politique de notre pays. Elle est faite pour incarner ses tendances profondes. Elle donne un cap.
Le président souhaite : « La réduction du nombre de parlementaires. Un Parlement moins nombreux mais renforcé dans ses moyens est un Parlement où le travail devient plus fluide (…), qui travaille mieux. »
Il proposera « une réduction d’un tiers du nombre des membres des trois assemblées constitutionnelles. Cette réforme est indispensable, dit-il, elle doit être conduite en veillant à la juste représentation de tous les territoires de la République. »

« Rendre compte »

L’exécutif devra lui aussi rendre des comptes. « Trop de mes prédécesseurs se sont vus reprocher un manque de pédagogie, de n’avoir pas précisé le sens et le cap de nos mandats, trop ont pris des initiatives alors que le Parlement n’était pas informé pour que je me satisfasse de continuer cette méthode. Tous les ans je viendrai devant vous pour rendre compte. »
Mais il entend aussi apporter au parlement une dose de proportionnelle. « La représentativité reste un combat inachevé dans notre pays. Je proposerai ainsi que le Parlement soit élu avec une dose de proportionnelle pour que toutes les sensibilités y soient justement représentées. Et ce, à cette même fin que nous limiterons dans le temps les mandats parlementaires. »

Le CESE réformé

« Le Conseil économique, social et environnemental doit devenir la chambre du futur où circuleront toutes les forces vives de la nation, ajoute Macron. Pour cela nous devons revoir, tout en réduisant le nombre de ses membres d’un tiers, de fond en comble les règles de sa représentativité. L’Etat ne travaille pas, ne réforme pas sans consulter…. En réformant le CESE, nous en ferons l’instance unique de consultation prévu par tous nos textes. »

La CJR supprimée

Le président de la République propose la suppression de la Cour de justice de la République. « Les ministres eux-mêmes doivent rester comptables de leurs actions. Nos concitoyens ne comprennent plus que seuls les ministres pourraient disposer d’une juridiction d’exception. »
Mais il entend aussi assurer l’indépendance totale de la justice. « Je souhaite que nous accomplissions enfin la séparation de l’exécutif et du judiciaire en confortant le rôle du conseil supérieur de la magistrature. »
Quand ? D’ici un an. « Je demanderai à Madame la garde des Sceaux, aux ministres compétents et aux présidents des deux chambres de me faire pour l’automne des propositions concrètes permettant d’atteindre cet objectif… Je souhaite que la totalité des transformations profondes que je viens de détailler et dont nos institutions ont cruellement besoin soit parachevée d’ici un an et que l’on se garde des demi-mesures et des aménagements cosmétiques ».

Fin de l’état d’urgence à l’automne

« Je rétablirai les libertés des Français en levant l’état d’urgence à l’automne. Parce que ces libertés sont les garanties d’une démocratie forte.
« Le code pénal tel qu’il est, le pouvoir des magistrats tel qu’il est, peuvent nous permettre d’anéantir nos adversaires. Mais d’un autre côté, je souhaite que le Parlement puisse voter ces dispositions nouvelles qui nous renforcerons dans nos libertés. »
Dans le même temps, des mesures « renforcées » seront prises pour lutter contre le terrorisme. Mais elles seront placées sous la surveillance d’un juge.

La voix de la France

« Enfin, la liberté forte c’est toujours, en France, la liberté de conscience. La France doit en être l’indispensable havre, l’éducation et la culture en sont les clés. Elles sont au cœur de notre action car en cette matière rien n’est jamais acquis.
« La laïcité en est l’indispensable corollaire. De cette culture libérale ouverte généreuse, nous devons refaire ensemble la singularité de la France. La voix de la France et de la culture française doivent occuper une place éminente. »

Le système de l’asile

Le président de la République entend réformer le système de l’asile. « Nous ne pouvons pas continuer d’affirmer hautement notre attachement aux principes de l’asile, tout en nous abstenant de réformer en profondeur « ce système qui, « débordé de toutes parts, ne permet pas un traitement humain et juste des demandes de protection » venant « d’hommes et de femmes menacés par la guerre et la persécution ».
Autrement dit, il s’agit d’accueillir les réfugiés politiques mais pas les migrants économiques.

Le renouvellement de nos armées

« Nos forces armées sont les conditions de cette capacité de dialogue, de cette crédibilité française. Cette indépendance que j’appelle de mes vœux ne veut pas dire solitude. La France restera fidèle à ses alliances.  Il faudra un renouvellement stratégique et tactique de nos armées, je sais qu’elles y sont prêtes. »

L’Europe

« Plus que jamais nous avons besoin de l’Europe. Or, elle est affaiblie par les divisions et par le doute qui s’est installé dans notre peuple… Négliger l’Europe c’est en quelque sorte abdiquer notre histoire et diminuer la France. La construction européenne est fragilisée par la bureaucratie… Je crois fermement à l’Europe, mais je ne trouve pas ce scepticisme injustifié. La décennie qui vient de s’achever a été pour l’Europe une décennie cruelle. Nous avons géré des crises mais nous avons perdu le cap. »

Des moments difficiles

« Nous connaissons à présent l’enthousiasme des commencements mais la gravité des circonstances nous empêche d’en ressentir aucune ivresse. La dureté de la vie est là pour tant et tant de nos concitoyens mais le peuple français nous a fait connaître ses volontés et nous en serons les serviteurs. »
Le président est lucide : « Il y aura de l’imprévu, de l’opposition, des moments difficiles, mais nous ne laisserons pas ces aléas nous décourager. Devant chaque difficulté nous ne baisserons pas les bras, nous en reviendrons à l’essentiel et nous y puiserons une énergie plus grande encore. J’y suis prêt, je suis sûr que vous l’êtes aussi car par notre engagement, les Françaises et les Français retrouveront leur fierté. Parce que nul ici n’a intérêt à ce que la France échoue. Le peuple français ne demande pas seulement de l’efficacité. Ils nous demandent ce que la philosophe Simone Weil appelait l’effectivité…

« Nous devons à chaque instant être à la hauteur de cet espoir français par l’engagement de tous car ne vous y trompez pas les forces adverses continuent d’être puissantes, non pas au Parlement ou dans la rue, tout simplement dans les têtes.
Le peuple français nous a fait connaître ses volontés, et nous en serons les serviteurs (…) Nous devons être à la hauteur de cet espoir français. Ce que nous avons à accomplir, c’est une véritable révolution. »

Emilien Lacombe

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