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Et si c’était Le Pen contre Mélenchon ?

Par les temps qui courent, la pratique des sondages a montré ses limites. En France comme ailleurs. On peut donc imaginer un « vote caché » qui pourrait réserver une grosse surprise le 23 avril.

Presidentielle France 2017-11 candidats
Présidentielle France 2017-11 candidats

Les sondeurs se sont lourdement trompés lors de précédentes consultations populaires. Aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, certes, mais aussi en France.
Qu’on se souvienne des primaires. A droite, on nous promettait Alain Juppé. Ce fut François Fillon. A gauche, on attendait Manuel Valls. Ce fut Benoît Hamon.
Depuis, les onze candidats à la présidentielle de 2017 semblent faire la course à l’Elysée en deux groupes distincts. D’un côté, les soi-disant « grands » candidats : Le Pen, Macron, Fillon, Hamon, Mélenchon. De l’autre, les « petits » candidats : Dupont-Aignan, Asselineau, Poutou, Arthaud, Cheminade, Lassalle.
Avec « les affaires » qui se sont invitées dans cette campagne pas comme les autres, le programme des uns et des autres semble passer au second plan. Globalement, on sait que Marine le Pen est à l’extrême droite, Jean-Luc Mélenchon à l’extrême gauche, Benoît Hamon, c’est peu ou prou la continuité de François Hollande et François Fillon, celle de Nicolas Sarkozy. Quant à Emmanuel Macron qui se veut hors des partis, il garde, même s’il s’en défend, l’image d’un banquier proche du milieu des affaires et de la finance.
Les autres, tous les autres, sont relégués, hélas ! au rang de faire-valoir.

Conjectures

A deux semaines du premier tour, que nous disent les sondages ?
Que Marine le Pen, dans tous les cas de figure, serait qualifiée pour le second tour. Avec 25 ou 26% des intentions de vote, elle bénéficie d’un socle d’électeurs inébranlable. Quoi qu’il lui arrive, elle conservera les suffrages de plus d’un quart du corps électoral.
Donc, Le Pen au second tour. Contre qui ? C’est ici que les analystes, les exégètes et autres observateurs de la vie politique française se perdent en conjectures. Car les données traditionnelles sur lesquelles ils fondent leur expertise ont volé en éclat.

Marine le Pen
Marine le Pen

La droite et la gauche, cela ne veut plus rien dire. La presse qui, d’ordinaire, relayait les grandes tendances de l’opinion publique, se trompe dans les grandes largeurs depuis l’avènement de l’internet et, surtout, des réseaux sociaux. Aujourd’hui, l’information circule à la vitesse de la lumière. Les réactions à une prise de position politique ou au dérapage d’un candidat sont immédiates. Elles sont commentées en direct. Les donneurs de leçons traditionnels qui pontifient à la radio, à la télé ou dans les journaux sont court-circuités par Facebook, Twitter et autres machines de guerre.
On se passe désormais de l’opinion des commentateurs « officiels ».
C’est comme ça.

Déboussolés

Dans ce contexte nouveau, dans ce monde nouveau où les médias traditionnels sont devenus ringards et peu objectifs, les instituts de sondage sont déboussolés. Pourtant, derrière Marine Le Pen -parfois à égalité- ils placent Emmanuel Macron. C’est le plus jeune des candidats, celui qui est en dehors du « système », qui semble séduire les jeunes comme les séniors. Il porte beau, fait régulièrement la Une de Paris-Match avec son épouse, ex-prof de français. De droite et de gauche on se rallie à son panache estampillé centre-droit à l’image d’un François Bayrou qui est venu faire allégeance au futur président.
Pourtant, après deux débats et quelques ralliement inopportuns, comme celui de Manuel Valls, Emmanuel Macron semble perdre du terrain. On le trouve creux. Son discours est vide. Sans relief. Il est d’accord avec tout le monde.
Les sondages s’affolent.
Emmanuel Macron 2017Derrière Macron ? François Fillon, le candidat qui déclenche des concerts de casseroles à chaque sortie. Avec environ 17 ou 18% des intentions de vote, il semble bien conserver lui aussi un socle inébranlable d’électeurs sur lesquels « les affaires » n’ont aucune prise. Fillon se prend à rêver. Et s’il y avait « un vote caché » ? Un vote bien plus élevé que les sondeurs ne le disent ? Oui, il se voit au second tour. Contre Le Pen.

Slogans

Derrière Fillon ? Jean-Luc Mélenchon. Parti à 10 ou 12%, il rattrape peu à peu le peloton de tête. Il est désormais donné à 16% après avoir lâché de dossard rose bonbon du socialiste Benoît Hamon (environ 10-12%) à la peine dans la dernière ligne droite.
Mélenchon grimpe tranquille. Le voilà dans la roue de Fillon. Encore quelques coups de pédale et sera dans celle de Macron. Le leader de la France insoumise a le souffle des vieux briscards. Il sait bien que près de 36% des électeurs ne savent pas encore pour qui ils vont voter !
Et puis, son slogan de campagne « La France insoumise » trouve un écho favorable dans l’opinion qui rejette la vieille politique, celle des combines. Le slogan de Macron « En Marche » est du niveau du cours élémentaire. Celui de Hamon « Faire battre le cœur de la France » est d’une platitude inouïe. Il rappelle les années 70. Quant à Fillon, il a changé « Le courage de la vérité » pour « Une volonté pour la France » tout aussi insipide.

Le Pen contre Mélenchon (capture BFMTV)
Le Pen contre Mélenchon (capture BFMTV)

Reste Marine Le Pen qui « Au nom du Peuple » cristallise bien des rancœurs et des ressentiments. Ce « peuple » qui n’en peut plus des privilèges, notamment ceux des élus, qui n’en peut plus des impôts, du chômage et de la pauvreté vécue par 10 millions de Français.
Le slogan de Le Pen rejoint, linguistiquement et politiquement parlant, celui de Mélenchon. L’un et l’autre s’adressent à cette partie de l’opinion qui gronde, qui n’en peut plus d’être taxée, d’être au chômage, d’être sous le joug de Bruxelles, de la finance, des lobbies…
On le dit souvent : les extrêmes se rejoignent.
Et si une majorité des électeurs se tournait vers l’extrême droite et vers l’extrême gauche le 23 avril ? Si Marine Le Pen était face à Jean-Luc Mélenchon le 7 mai prochain ?
Aucun sondage ne le prévoit. Mais on sait ce que valent sondages !

Marcel GAY

France