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SNCF :  » la dette n’est pas celle des cheminots ! »

Point-de-vue. Pourquoi la question de la dette ne peut ni ne doit être entrevu comme un point de sortie de crise, affirme Bernard Aubin, secrétaire général du syndicat FiRST.

Peu ou pas de trafic sur les rails (DR)
Peu ou pas de trafic sur les rails (DR)
  1. La dette infrastructures, qui s’élève à quelque 47 G€, relève essentiellement de la responsabilité des gouvernements successifs. Ceux-ci se sont se désintéressés de la maintenance du réseau classique, et ont en imposé à la SNCF de financer à leur place leurs projets de LGV.
  2. L’assainissement de la situation financière de la SNCF était une contrepartie obligatoire de l’ouverture du réseau à la concurrence. Cette contrainte résultait de la directive européenne 91-440, qui sur ce point n’a jamais été mise en œuvre en France. Jamais aucun gouvernement n’en a été inquiété. En toute logique, la reprise, au moins partielle, de la dette, aurait dû intervenir avant 2003, date de la première phase d’ouverture à la concurrence. Quinze années plus tard, alors que la SNCF et ses cheminots ont été fortement impactés par les dégâts causés par la situation de concurrence déloyale, le sujet vient enfin sur le devant de la scène.

Levée de boucliers

  1. En juillet 2017, avant même que les différents rapports sur l’avenir des transports ne soient commandités et encore moins restitués, Emmanuel Macron évoquait déjà devant une poignée de cheminots la possibilité d’une reprise de la dette en contrepartie de reculs sociaux. Une expression que FiRST avait considérée comme une véritable déclaration de guerre, et qui avait immédiatement donné lieu à une levée de bouclier de l’ensemble des syndicats de la SNCF. Il est, en effet, totalement inadmissible de faire contribuer de quelque manière que ce soit les cheminots au paiement des traites d’une dette qui n’est ni la leur, ni celle de leur entreprise. Pire, solliciter à ce titre les cheminots de la SNCF reviendrait à leur imposer des sacrifices qui, au final, bénéficieraient aux opérateurs privés appelés à conquérir le réseau !

L’avenir du réseau ferré

  1. Tous les syndicats revendiquaient jusqu’à présent la reprise intégrale par l’Etat d’une dette qui n’est pas celle de la SNCF. Cela au regard des difficultés qu’engendre le fardeau financier, de ses répercussions sur les conditions de travail des cheminots astreints à une productivité de plus en plus élevée, des risques que la dette fait porter sur le périmètre et sur l’avenir même du réseau ferré… Or, à ce jour, si la réforme devait se mettre en œuvre en l’état, tous ces risques deviendraient de fait réalité, désendettement ou non ! Les reculs sociaux imposés par la réforme sont bien plus importants que ceux que font redouter les effets de la dette. L’avenir de l’Entreprise, avec sa transformation en SA, est bien plus compromis par la réforme qu’il ne l’aurait été par la situation financière. En transférant la responsabilité des petites lignes aux régions déjà exsangues, l’Etat les condamne à court terme et se défausse au passage de ses responsabilité.
    Enfin, le transfert aux opérateurs privés des cheminots lors de la perte de marché TER constitue une mesure gravissime qui elle aussi va bien au-delà des menaces que faisait peser la dette. En résumé, la question du règlement de la dette était effectivement cruciale avant la réforme, au vu des risques qu’elle engendrait à moyen terme. Or, si elle venait être déclinée en l’état, la réforme aurait sur tous points des conséquences bien plus dramatiques que celles qu’elle faisait courir. De fait, la question du désendettement est devenue subsidiaire.

Pour conclure

Mise en œuvre, la réforme souhaitée par le gouvernement transforme tour ce qui relevait des risques en réalité, et même au-delà. De fait, la résolution de cette problématique financière ne relève plus d’une « concertation » avec les syndicats, mais de la responsabilité exclusive de la direction de la SNCF.
A ce stade, l’annonce d’une remise de tout ou partie de cette dette pourrait même constituer une nouvelle provocation de la part du gouvernement, dans la mesure où les premiers à tirer bénéfice de cette mesure… seraient les opérateurs privés ! Des concurrents qui seraient les premiers à tirer bénéfice de la remise à neuf du réseau !
Peut-on imaginer un seul instant que les cheminots se réjouiraient, après avoir été rendus responsables des dysfonctionnements de la SNCF et alors qu’ils œuvrent au quotidien dans des situations dégradées, de mesures qui bénéficieront en priorité à la concurrence ?
Malheur à ceux qui seraient tenté de mettre à profit la question de la dette pour baisser la garde. Les cheminots ne leur pardonneraient pas cette trahison !

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