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Dany Boon : « C’est ma famille »

C’est le retour du biloute : l’acteur-réalisateur retourne dans le Nord avec son nouveau film, « La Ch’tite Famille ».

Cette "C"hite famille" parle fort et en fait un peu trop, mais Dany Boon a de la tendresse et de la bienveillance pour ses personnages.
Cette « C »hite famille » parle fort et en fait un peu trop, mais Dany Boon a de la tendresse et de la bienveillance pour ses personnages.

Dix ans après « Bienvenue chez les Ch’tis », le nouveau film de Dany Boon, « La Ch’tite Famille » (sortie le 28 février), n’est pas une suite du long-métrage événement aux plus de 20 millions de spectateurs, mais il en a l’accent. Il y a dix ans, un gars du Sud (Kad Merad) était puni et muté « dans le Nord ! » ; cette fois, c’est un ancien Ch’ti, joué par Dany Boon lui-même, qui est devenu plus Parisien qu’un Parisien : désagréable, égoïste, arrogant, qui fait la gueule, et a complètement renié sa famille de prolos des Hauts de France.

Le biloute fait donc son retour avec une « Ch’tite Famille » composée d’acteurs originaires du Nord : Line Renaud, Pierre Richard, Valérie Bonneton, Guy Lecluyse… Tandis que lui forme avec la jolie Laurence Arné un couple de designers renommés, chics, chers et distingués, qui font la couverture de « Paris-Match », et conçoivent des meubles stylés, élégants, et surtout très inconfortables. L’artiste mondain a même fait croire qu’il était orphelin, et donc panique lorsque toute la smala débarque du Nord, surprise !

L’importance des racines, de la famille

Double panique, lorsqu’après un « accident », il a perdu une part de sa mémoire, ne reconnait pas sa femme, a oublié sa carrière, mais a retrouvé sa môman et l’accent ch’ti qu’il avait encore il y a vingt ans. Dans la première partie du film, ça parle fort et en ch’ti, ça s’agite et ça en fait trop ; les Nordistes sont aussi caricaturés que les Parigots têtes de veaux. Puis Dany Boon trouve le juste ton au coeur de son histoire, sur l’importance de ses racines, de sa famille, de son passé, de là d’où on vient.

Ainsi, par amour de son mari amnésique, la snob Parisienne fait des efforts pour le reconquérir, la bourgeoise apprend le ch’ti. « J’ai mis du temps à l’apprendre et je l’ai vite oublié », confie Laurence Arné, « Dans mon rôle, il ne fallait pas que ce soit parfait, c’est ce qui rendait la démarche touchante, c’est un peu maladroit. Le plus difficile a été de lire le scénario écrit en ch’ti », sourit l’actrice.

Un hommage posthume à Johnny

Dany Boon a dédicacé son film à Johnny, dont il a transposé le « Que je t’aime » en « Que j’te ker » dans la séquence finale. « Il le savait, je lui en avais parlé, je voulais tourner avec lui d’ailleurs, malheureusement on n’a pas eu le temps, et malheureusement cette chanson est devenue un hommage posthume », confie l’acteur-réalisateur. « J’étais très proche de Johnny, on se voyait régulièrement, nos enfants sont à l’école ensemble. J’ai eu la chance de le rencontrer pour la première fois il y a seize ans », raconte Dany Boon, « J’ai eu une relation avec lui très chouette, très forte, c’était un passionné de cinéma, j’ai eu la chance qu’il aimait beaucoup mes films. J’étais très attaché à lui, j’étais très fan de lui ».

Patrick TARDIT

« La Ch’tite Famille », film de Dany Boon (sortie le 28 février et quelques jours plus tôt, le 23 février, « din Ch’Nord »).

Dany Boon : « J’essaie de raconter des histoires vraies et tendres »

Dany Boon : "C'est beaucoup l'enfance qui influence l'écriture".
Dany Boon : « C’est beaucoup l’enfance qui influence l’écriture ».

« Comment cha’va ? », demande Line Renaud, en entrant dans un salon du Park Hyatt Vendôme, à Paris, pour une conférence de presse rassemblant la « Ch’tite Famille ». « Quand il tourne, Dany crée une famille, on n’a pas l’impression de travailler, on a l’impression de réaliser quelque chose ensemble », dit Line Renaud, qui se déplace avec une béquille, confie qu’elle a subi une opération de la hanche.

La comédienne s’est amusée à retrouver l’accent de sa jeunesse : « Je ne l’entendais pas. Quand Loulou Gasté est devenu mon pygmalion, le premier travail a été de me faire perdre cet accent du nord. Dès que j’allais passer quelques jours chez ma grand-mère, ça revenait tout de suite, j’ai eu beaucoup de mal avec ça », dit Line Renaud, « Je suis tellement attachée au Nord, toute ma force, mon envie de combattre, mon envie de foncer, me vient des femmes du Nord ».

« Je n’ai jamais eu honte de mes origines »

Comme sa maman de cinéma, Dany Boon a lui aussi gommé cet accent qu’il retrouve en colère : « Quand j’m’énerve, le ch’ti revient facilement », dit-il, « Quand j’ai commencé ma carrière, on me disait mais pourquoi le Ch’ti, pourquoi cet accent, pourquoi ces personnages-là, pourquoi la déprime ? Les gens me disaient que c’était trop dur, qu’il fallait faire des sketches plus consensuels sur le couple, sur le foot, pour être plus parisien, moins province. En fait, c’est ce qui a fait ma différence, je n’ai jamais eu honte quand je suis arrivé à Paris ni de mes origines ni de mon côté provincial, au contraire je les ai assumés, ni de ma famille modeste, elle nourrit mon écriture depuis toujours ».

C’est enfant, dans le Nord, dans une école catho, que le jeune Dany a eu honte : « J’étais le seul fils de prolo avec un copain, et donc on se moquait beaucoup de nous et de notre accent ». « Honte » encore, lorsqu’il fallait remplir la case profession des parents. Et encore « honte », lorsque débarrassé de ses intonations  de ch’ti, sa mère femme de ménage lui a dit qu’il avait un accent de « frimeux ».

« C’est beaucoup l’enfance qui influence l’écriture », assure Dany Boon, « Ce qui m’intéressait dans ce film, après Bienvenue chez les Ch’tis, c’est de revenir avec un film sur le Nord qui offre quelque chose d’autre, pas de suite surtout. On va rire avec la mentalité ch’ti, avec l’accent ch’ti, mais dans une histoire différente. Et aussi d’y amener de la profondeur et de l’humanité, je trouve que ça donne beaucoup de qualité au rire d’avoir des scènes d’émotion, c’est une forme de maturité d’écrire et de jouer des scènes d’émotion fortes où je me livre beaucoup, en fait. C’est mon histoire, c’est ma famille, le personnage de Line Renaud, qui est central, c’est le soleil du film, c’est beaucoup ma mère ».

« Je suis fan de Pierre Richard depuis l’enfance »

"Pierre Richard n'a pas d'âge, il a envie de faire rire, d'émouvoir", dit Dany Boon.
« Pierre Richard n’a pas d’âge, il a envie de faire rire, d’émouvoir », dit Dany Boon.

« Toute mon écriture, même mes sketches, vient d’un regard naïf et enfantin sur le monde, parce que j’ai découvert les choses très tard », dit-il, évoquant ses premières fois tardives à la piscine, au restaurant, à la mer… « J’ai joué sur scène avant d’avoir les moyens d’être dans la salle, je ne me suis pas rendu compte de la difficulté que c’était, de manière presque inconsciente, sinon j’aurais eu un trac fou, je ne l’aurais pas fait ».

De trop d’exubérance, sa « Ch’tite famille » se fait par moments exaspérante, mais Dany Boon injecte une bonne dose de tendresse, et de bienveillance pour ses personnages, des gens « simples ». « J’essaie de raconter des histoires vraies et tendres, en montrant l’humanité cachée des gens, chez nous tous, en prenant un angle un peu dévié, un peu clownesque, un regard un peu enfantin, qui est celui que j’avais quand j’ai eu toutes mes premières émotions quand j’étais enfant ».

L’enfance encore, avec les séquences burlesques écrite pour Pierre Richard (originaire de Valenciennes), qui joue son père. « Il est très enfantin aussi, il n’a pas d’âge, il a envie de faire rire, d’émouvoir », s’enthousiasme Dany Boon, « Je suis fan de Pierre Richard depuis l’enfance, je montre ses films à mes enfants aujourd’hui. Quand il est arrivé le premier jour sur le plateau, j’ai dit à toute mon équipe : vous avez vu, c’est Pierre Richard ! C’était chouette ».

Le premier César du Public pour « Raid Dingue »

Sur la scène de la Salle Pleyel, Dany Boon recevra le 2 mars un tout nouveau César, celui du Public, décerné au film français qui a fait le plus d’entrées dans l’année, le sien : « Raid Dingue » (4,6 millions d’entrées). « Du coup, j’irai pas en jogging », plaisante-t-il, faisant allusion à la polémique d’il y a dix ans, sur l’absence de comédies dans les nominations, qu’il avait désamorcée en une apparition surprise à la cérémonie des Césars.

« Je suis très heureux, je suis ravi, c’est dommage qu’il n’y ait pas une catégorie meilleure comédie, meilleur acteur et meilleure actrice dans une comédie, comme aux Golden Globes, mais c’est un pas », ajoute-t-il plus sérieusement. « Il y a dix ans, je n’ai pas dit : je veux que les comédies aient des récompenses ; j’ai dit : j’aimerais que les comédies soient représentées au premier tour, comme ça l’a été par le passé. Les Césars et les festivals servent aussi à faire connaître des films plus difficiles d’accès ou moins grand public, c’est important qu’on habitue les gens à aller voir un spectre artistique très large. La comédie, c’est l’origine du cinéma, le premier film des frères Lumière c’est L’arroseur arrosé », rappelle Dany Boon.

Propos recueillis par Patrick TARDIT

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